
1 Samuel 26, 2-23 ; Psaume 103 ; 1 Corinthiens 15, 45-49 ; Luc 6, 27-38
Luc 6, 27-38
27 « Je vous dis, à vous qui m’écoutez : Aimez vos ennemis, faites du bien à ceux qui vous haïssent,
28 bénissez ceux qui vous maudissent, priez pour ceux qui vous calomnient.
29 « À qui te frappe sur une joue, présente encore l’autre. À qui te prend ton manteau, ne refuse pas non plus ta tunique.
30 À quiconque te demande, donne, et à qui te prend ton bien, ne le réclame pas.
31 Et comme vous voulez que les hommes agissent envers vous, agissez de même envers eux.
32 « Si vous aimez ceux qui vous aiment, quelle grâce est la vôtre ? »Car les pécheurs aussi aiment ceux qui les aiment.
33 Et si vous faites du bien à ceux qui vous en font, quelle grâce est la vôtre ? Les pécheurs eux-mêmes en font autant.
34 Et si vous prêtez à ceux dont vous espérez qu’ils vous rendent, quelle grâce est la vôtre ? Même des pécheurs prêtent aux pécheurs pour qu’on leur rende l’équivalent.
35 Mais aimez vos ennemis, faites du bien et prêtez sans rien espérer en retour. Alors votre récompense sera grande, et vous serez les fils du Très-Haut, car il est bon, lui, pour les ingrats et les méchants.
36 « Soyez généreux comme votre Père est généreux.
37 Ne vous posez pas en juges et vous ne serez pas jugés, ne condamnez pas et vous ne serez pas condamnés, acquittez et vous serez acquittés.
38 Donnez et on vous donnera ; c’est une bonne mesure, tassée, secouée, débordante qu’on vous versera dans le pan de votre vêtement, car c’est la mesure dont vous vous servez qui servira aussi de mesure pour vous. »
Que font les êtres humains que nous sommes face à l'inimitié, à l'agressivité, à la calomnie, à l'injustice à notre égard, à l'ingratitude, au désamour ?
En général, nous sommes tentés, quand nous n'en sommes pas carrément fiers, de répondre du tac au tac. Répondre par l'inimitié à ceux qui se montrent nos ennemis ; par l'agressivité à l'égard de ceux qui nous agressent ; le mépris ou l'insulte envers ceux qui nous calomnient ; le rejet envers les ingrats ; le détournement de ceux qui nous témoignent un manque d'amour.
Si nous n'en sommes pas carrément fiers, nous sommes au moins tentés de répondre de cette façon-là, ou pour les plus modérés, au minimum par le mépris et l'indifférence.
Face à cela, le difficile comportement requis des disciples. Jusqu’à « tendre l'autre joue ! » Difficile comportement de disciples suscitant souvent l'ironie. Pourtant, c'est bien écrit !…
Où il s’agit de prendre garde à quelques erreurs habituelles de lecture — par exemple celle qui consiste à confondre, pour cet exemple précis, la vengeance personnelle avec la justice, dont les personnes privées ne sont pas dépositaires ! L’attitude personnelle prônée ici renvoie à la loi ; et en premier lieu à la Torah — qui a pour fonction de libérer chacun d'avoir à juger soi-même, voire à haïr autrui, fût-il ennemi, — en un mot se venger soi-même.
Dans un texte parallèle (Ro 12, 17-21), Paul cite le Deutéronome (32, 35) et le Livre des Proverbes (25, 21-22) pour dire que la vengeance et le châtiment relèvent de Dieu, seul juge ultime, et de toute façon miséricordieux, juge ultime au-delà même des pourtant légitimes, mais pas infaillibles, autorités humaines.
Il y a quelque chose de cette conviction dans l'attitude de David à l'égard de Saül dans le Livre de Samuel (1 S 26, 2-23 — v. 10 : « c’est à l’Éternel seul à le frapper, soit que son jour vienne et qu’il meure, soit qu’il descende sur un champ de bataille et qu’il y périsse »).
Cela dit, le texte du 1er livre de Samuel — qui considère Dieu et son représentant sous l’angle de la justice civile, et non du comportement individuel — ne parle donc pas de la même chose que Jésus. Th. de Bèze, notamment, s’est appuyé sur 1 Samuel en initiant, dans son livre Du droit des magistrats, le droit de résistance à l’oppression. On a fait dire au Réformateur ce qu’il n’a pas dit, à savoir qu’il serait à l'origine de ce qui deviendra les assassinats politiques des rois Henri III et Henri IV. Total contresens, puisque s’il reconnaît aux magistrats le droit, voire le devoir, de s'opposer à un pouvoir oppresseur, fût-il le pouvoir du roi, il refuse catégoriquement la possibilité de porter la main contre lui, parce qu’il est choisi par Dieu, il est l’oint de Dieu. Et pour cela il se fonde sur notre texte de Samuel où David refuse de porter la main sur le roi en titre, Saül.
Le rapport avec l’Évangile de Luc est uniquement que nous sommes alors dans le contexte de l'oppression romaine — qui comptait des humiliations diverses des populations soumises, et auxquelles Jésus fait ici allusion concernant son peuple.
Or, si la Bible ne prône pas la vengeance individuelle, elle n’enseigne pas non plus la passivité des peuples. Sur ce plan, il y a un temps pour tout. Il n'est pas raisonnable d'agir de façon suicidaire et de poser des actions d'éclat inutiles sinon nuisibles, sans faire preuve de sagesse. Dieu est celui qui exerce la justice, et qui venge les opprimés. Pas nous comme personnes privées. Quoiqu’il utilise pour cela même la justice humaine et l'action humaine. Il y a aussi un temps pour les armes — hélas d'ailleurs. Et ce n'est pas de ce temps qu'il est question dans notre texte.
Il s’agit ici pour les disciples de vivre dans l'imitation de la miséricorde dont ils savent bénéficier eux-mêmes et dans la totale liberté vis-à-vis de leur désir de vengeance, fût-ce un juste désir de vengeance, même légitime, parlant de crimes pouvant aller jusqu'à l'horreur ! Il s'agit ici, comme chez Paul, et cela vaut en tout temps et pour tous, de libérer chacun, fût-il victime de quelque crime, de la charge supplémentaire d'avoir à souffrir d'un désir de vengeance, souffrir du souci de se fermer et de se replier plutôt que de vivre, au prétexte qu'autrui a nourri ou continue à nourrir contre moi de l'inimitié, ou que sais-je encore. Terrible façon de ne jamais se libérer de son oppresseur, de lui rester lié par le désir de vengeance. “Le piège de la haine, c'est qu'elle nous enlace trop étroitement à l'adversaire” écrit Milan Kundera (L'immortalité, folio, p. 44).
Non pas, donc, qu'il soit question de prôner l'impunité, pour quelque faute que ce soit. Mais cela ne relève pas de la vengeance individuelle.
« Si vous vivez dans la captivité du désir de vengeance, du besoin permanent de veiller à ce que vous soyez traités équitablement, quelle grâce est la vôtre ? » demande Jésus, quelle liberté avez vous ? Car il ne s'agit pas ici d'une sorte de redevance, comme pourraient le laisser croire certaines habitudes de traduction, comme : « quel gré vous en saura-t-on ? » ou « quelle récompense, ou reconnaissance, vous en aura-t-on ? » pour ce qui est littéralement en grec « quelle grâce est la vôtre ? » Ce n’est pas la même chose ! Laisser penser que dans l'amour d'autrui, il serait question de mérite à récompenser ; là où il n'est question que de signe de la liberté que donne la grâce !
Si vous n'aimez que ceux dont vous êtes sûrs qu'ils vous aiment, « quelle grâce avez-vous de plus que les pécheurs les plus aveugles à la grâce ? » Telle est bien la question. Dès lors, quid d'être disciple d’un maître qui lui n'a pas prétendu être en charge de la vengeance, allant plutôt jusqu'à la croix ?
« Aimez vos ennemis », donc, soyez libres envers tous, sortez des rancœurs. C'est l'enseignement de la Torah ! Donne et il te sera donné. Et aime sans attendre en retour. Fais à autrui ce que tu voudrais qu'il te fasse. Sois miséricordieux comme l'est ton Père. Sinon, quelle grâce est la tienne ?
Ici apparaît sans doute l'essentiel de la question, dans ce texte qui oppose les disciples et, selon les mots employés, les pécheurs, qui aiment ceux qui les aiment, sont bons envers ceux qui sont bons, prêtent à ceux qui leurs rendent, etc.
Toi, imite plutôt ton Père ! Car que fait un enfant, comment montre-t-il qu'il est enfant de son père ? En l'imitant. Or, que fait Dieu, le Père ? Il est bon envers tous. Il fait rayonner son soleil sur les bons et les méchants, est-il dit dans le même ordre d’idée. Il est bon envers les ingrats et les méchants.
Le péché, qui fait s'imaginer qu'on ne vit pas de la grâce, consistera ici à penser que les ingrats et les méchants, ce sont les autres ; et qu'effectivement Dieu est bien bon de continuer à être généreux envers eux. Le disciple du Christ, lui, sait bien qu'il ne mérite rien, et qu'il est dans la catégorie des ingrats et des méchants ; et que donc il ne subsiste que par la seule miséricorde et générosité de son Père. Il ne lui reste donc qu'à agir de même.
C'est pourquoi juste après cet appel à être généreux comme notre Père, il nous est dit de ne pas juger, de ne pas condamner ; c'est-à-dire déjà, ne pas nous imaginer que l'ingratitude et la méchanceté sont le fait des autres. Avoir donc un comportement généreux en cela aussi, sachant que nous ne méritons pas ce que nous recevons.
Dieu est généreux et miséricordieux envers les ingrats que nous sommes. À lui donc la justice. Et cela d'une façon tellement juste qu'il nous demande à nous de lui fournir les balances et les règles avec lesquelles il nous mesure. Ce sont tout simplement celles que nous utilisons : « c’est la mesure dont vous vous servez qui servira aussi de mesure pour vous » (v. 38). Que cette mesure soit donc celle de la grâce que nous avons reçue !
On comprend alors pourquoi ce qu'on appelle la règle d'or se trouve au milieu de ce passage : « comme vous voulez que les hommes agissent envers vous, agissez de même envers eux. » Ou redoutez que le jugement que vous portez sur eux ne retombe sur vous qui agissez au fond de la même manière. « Comme vous voulez que les hommes agissent envers vous, agissez de même envers eux. » C'est sans doute le tout de la règle de comportement que requiert de nous Jésus : puisque vous êtes des graciés, qui vivez droits devant Dieu sans aucun mérite, n'en exigez pas d'autrui pour agir à son égard selon la même générosité, le même sens du don qui est celui de votre Père.
Luc 6, 27-38
27 « Je vous dis, à vous qui m’écoutez : Aimez vos ennemis, faites du bien à ceux qui vous haïssent,
28 bénissez ceux qui vous maudissent, priez pour ceux qui vous calomnient.
29 « À qui te frappe sur une joue, présente encore l’autre. À qui te prend ton manteau, ne refuse pas non plus ta tunique.
30 À quiconque te demande, donne, et à qui te prend ton bien, ne le réclame pas.
31 Et comme vous voulez que les hommes agissent envers vous, agissez de même envers eux.
32 « Si vous aimez ceux qui vous aiment, quelle grâce est la vôtre ? »Car les pécheurs aussi aiment ceux qui les aiment.
33 Et si vous faites du bien à ceux qui vous en font, quelle grâce est la vôtre ? Les pécheurs eux-mêmes en font autant.
34 Et si vous prêtez à ceux dont vous espérez qu’ils vous rendent, quelle grâce est la vôtre ? Même des pécheurs prêtent aux pécheurs pour qu’on leur rende l’équivalent.
35 Mais aimez vos ennemis, faites du bien et prêtez sans rien espérer en retour. Alors votre récompense sera grande, et vous serez les fils du Très-Haut, car il est bon, lui, pour les ingrats et les méchants.
36 « Soyez généreux comme votre Père est généreux.
37 Ne vous posez pas en juges et vous ne serez pas jugés, ne condamnez pas et vous ne serez pas condamnés, acquittez et vous serez acquittés.
38 Donnez et on vous donnera ; c’est une bonne mesure, tassée, secouée, débordante qu’on vous versera dans le pan de votre vêtement, car c’est la mesure dont vous vous servez qui servira aussi de mesure pour vous. »
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Que font les êtres humains que nous sommes face à l'inimitié, à l'agressivité, à la calomnie, à l'injustice à notre égard, à l'ingratitude, au désamour ?
En général, nous sommes tentés, quand nous n'en sommes pas carrément fiers, de répondre du tac au tac. Répondre par l'inimitié à ceux qui se montrent nos ennemis ; par l'agressivité à l'égard de ceux qui nous agressent ; le mépris ou l'insulte envers ceux qui nous calomnient ; le rejet envers les ingrats ; le détournement de ceux qui nous témoignent un manque d'amour.
Si nous n'en sommes pas carrément fiers, nous sommes au moins tentés de répondre de cette façon-là, ou pour les plus modérés, au minimum par le mépris et l'indifférence.
Face à cela, le difficile comportement requis des disciples. Jusqu’à « tendre l'autre joue ! » Difficile comportement de disciples suscitant souvent l'ironie. Pourtant, c'est bien écrit !…
Où il s’agit de prendre garde à quelques erreurs habituelles de lecture — par exemple celle qui consiste à confondre, pour cet exemple précis, la vengeance personnelle avec la justice, dont les personnes privées ne sont pas dépositaires ! L’attitude personnelle prônée ici renvoie à la loi ; et en premier lieu à la Torah — qui a pour fonction de libérer chacun d'avoir à juger soi-même, voire à haïr autrui, fût-il ennemi, — en un mot se venger soi-même.
Dans un texte parallèle (Ro 12, 17-21), Paul cite le Deutéronome (32, 35) et le Livre des Proverbes (25, 21-22) pour dire que la vengeance et le châtiment relèvent de Dieu, seul juge ultime, et de toute façon miséricordieux, juge ultime au-delà même des pourtant légitimes, mais pas infaillibles, autorités humaines.
Il y a quelque chose de cette conviction dans l'attitude de David à l'égard de Saül dans le Livre de Samuel (1 S 26, 2-23 — v. 10 : « c’est à l’Éternel seul à le frapper, soit que son jour vienne et qu’il meure, soit qu’il descende sur un champ de bataille et qu’il y périsse »).
Cela dit, le texte du 1er livre de Samuel — qui considère Dieu et son représentant sous l’angle de la justice civile, et non du comportement individuel — ne parle donc pas de la même chose que Jésus. Th. de Bèze, notamment, s’est appuyé sur 1 Samuel en initiant, dans son livre Du droit des magistrats, le droit de résistance à l’oppression. On a fait dire au Réformateur ce qu’il n’a pas dit, à savoir qu’il serait à l'origine de ce qui deviendra les assassinats politiques des rois Henri III et Henri IV. Total contresens, puisque s’il reconnaît aux magistrats le droit, voire le devoir, de s'opposer à un pouvoir oppresseur, fût-il le pouvoir du roi, il refuse catégoriquement la possibilité de porter la main contre lui, parce qu’il est choisi par Dieu, il est l’oint de Dieu. Et pour cela il se fonde sur notre texte de Samuel où David refuse de porter la main sur le roi en titre, Saül.
Le rapport avec l’Évangile de Luc est uniquement que nous sommes alors dans le contexte de l'oppression romaine — qui comptait des humiliations diverses des populations soumises, et auxquelles Jésus fait ici allusion concernant son peuple.
Or, si la Bible ne prône pas la vengeance individuelle, elle n’enseigne pas non plus la passivité des peuples. Sur ce plan, il y a un temps pour tout. Il n'est pas raisonnable d'agir de façon suicidaire et de poser des actions d'éclat inutiles sinon nuisibles, sans faire preuve de sagesse. Dieu est celui qui exerce la justice, et qui venge les opprimés. Pas nous comme personnes privées. Quoiqu’il utilise pour cela même la justice humaine et l'action humaine. Il y a aussi un temps pour les armes — hélas d'ailleurs. Et ce n'est pas de ce temps qu'il est question dans notre texte.
Il s’agit ici pour les disciples de vivre dans l'imitation de la miséricorde dont ils savent bénéficier eux-mêmes et dans la totale liberté vis-à-vis de leur désir de vengeance, fût-ce un juste désir de vengeance, même légitime, parlant de crimes pouvant aller jusqu'à l'horreur ! Il s'agit ici, comme chez Paul, et cela vaut en tout temps et pour tous, de libérer chacun, fût-il victime de quelque crime, de la charge supplémentaire d'avoir à souffrir d'un désir de vengeance, souffrir du souci de se fermer et de se replier plutôt que de vivre, au prétexte qu'autrui a nourri ou continue à nourrir contre moi de l'inimitié, ou que sais-je encore. Terrible façon de ne jamais se libérer de son oppresseur, de lui rester lié par le désir de vengeance. “Le piège de la haine, c'est qu'elle nous enlace trop étroitement à l'adversaire” écrit Milan Kundera (L'immortalité, folio, p. 44).
Non pas, donc, qu'il soit question de prôner l'impunité, pour quelque faute que ce soit. Mais cela ne relève pas de la vengeance individuelle.
« Si vous vivez dans la captivité du désir de vengeance, du besoin permanent de veiller à ce que vous soyez traités équitablement, quelle grâce est la vôtre ? » demande Jésus, quelle liberté avez vous ? Car il ne s'agit pas ici d'une sorte de redevance, comme pourraient le laisser croire certaines habitudes de traduction, comme : « quel gré vous en saura-t-on ? » ou « quelle récompense, ou reconnaissance, vous en aura-t-on ? » pour ce qui est littéralement en grec « quelle grâce est la vôtre ? » Ce n’est pas la même chose ! Laisser penser que dans l'amour d'autrui, il serait question de mérite à récompenser ; là où il n'est question que de signe de la liberté que donne la grâce !
Si vous n'aimez que ceux dont vous êtes sûrs qu'ils vous aiment, « quelle grâce avez-vous de plus que les pécheurs les plus aveugles à la grâce ? » Telle est bien la question. Dès lors, quid d'être disciple d’un maître qui lui n'a pas prétendu être en charge de la vengeance, allant plutôt jusqu'à la croix ?
« Aimez vos ennemis », donc, soyez libres envers tous, sortez des rancœurs. C'est l'enseignement de la Torah ! Donne et il te sera donné. Et aime sans attendre en retour. Fais à autrui ce que tu voudrais qu'il te fasse. Sois miséricordieux comme l'est ton Père. Sinon, quelle grâce est la tienne ?
Ici apparaît sans doute l'essentiel de la question, dans ce texte qui oppose les disciples et, selon les mots employés, les pécheurs, qui aiment ceux qui les aiment, sont bons envers ceux qui sont bons, prêtent à ceux qui leurs rendent, etc.
Toi, imite plutôt ton Père ! Car que fait un enfant, comment montre-t-il qu'il est enfant de son père ? En l'imitant. Or, que fait Dieu, le Père ? Il est bon envers tous. Il fait rayonner son soleil sur les bons et les méchants, est-il dit dans le même ordre d’idée. Il est bon envers les ingrats et les méchants.
Le péché, qui fait s'imaginer qu'on ne vit pas de la grâce, consistera ici à penser que les ingrats et les méchants, ce sont les autres ; et qu'effectivement Dieu est bien bon de continuer à être généreux envers eux. Le disciple du Christ, lui, sait bien qu'il ne mérite rien, et qu'il est dans la catégorie des ingrats et des méchants ; et que donc il ne subsiste que par la seule miséricorde et générosité de son Père. Il ne lui reste donc qu'à agir de même.
C'est pourquoi juste après cet appel à être généreux comme notre Père, il nous est dit de ne pas juger, de ne pas condamner ; c'est-à-dire déjà, ne pas nous imaginer que l'ingratitude et la méchanceté sont le fait des autres. Avoir donc un comportement généreux en cela aussi, sachant que nous ne méritons pas ce que nous recevons.
Dieu est généreux et miséricordieux envers les ingrats que nous sommes. À lui donc la justice. Et cela d'une façon tellement juste qu'il nous demande à nous de lui fournir les balances et les règles avec lesquelles il nous mesure. Ce sont tout simplement celles que nous utilisons : « c’est la mesure dont vous vous servez qui servira aussi de mesure pour vous » (v. 38). Que cette mesure soit donc celle de la grâce que nous avons reçue !
On comprend alors pourquoi ce qu'on appelle la règle d'or se trouve au milieu de ce passage : « comme vous voulez que les hommes agissent envers vous, agissez de même envers eux. » Ou redoutez que le jugement que vous portez sur eux ne retombe sur vous qui agissez au fond de la même manière. « Comme vous voulez que les hommes agissent envers vous, agissez de même envers eux. » C'est sans doute le tout de la règle de comportement que requiert de nous Jésus : puisque vous êtes des graciés, qui vivez droits devant Dieu sans aucun mérite, n'en exigez pas d'autrui pour agir à son égard selon la même générosité, le même sens du don qui est celui de votre Père.
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