dimanche 27 décembre 2020

Relevailles




Genèse 15, 1-6 & 21, 1-3 ; Psaume 105 ; Hébreux 11, 8-19 ; Luc 2, 22-40

Luc 2, 22-40
22 Puis quand vint le jour où, suivant la loi de Moïse, ils devaient être purifiés, ils l’amenèrent à Jérusalem pour le présenter au Seigneur
23 — ainsi qu’il est écrit dans la loi du Seigneur : Tout garçon premier-né sera consacré au Seigneur —
24 et pour offrir en sacrifice, suivant ce qui est dit dans la loi du Seigneur, un couple de tourterelles ou deux petits pigeons.
25 Or, il y avait à Jérusalem un homme du nom de Syméon. Cet homme était juste et pieux, il attendait la consolation d’Israël et l’Esprit Saint était sur lui.
26 Il lui avait été révélé par l’Esprit Saint qu’il ne verrait pas la mort avant d’avoir vu le Christ du Seigneur.
27 Il vint alors au temple poussé par l’Esprit; et quand les parents de l’enfant Jésus l’amenèrent pour faire ce que la Loi prescrivait à son sujet,
28 il le prit dans ses bras et il bénit Dieu en ces termes :
29 "Maintenant, Maître, c’est en paix, comme tu l’as dit, que tu renvoies ton serviteur.
30 Car mes yeux ont vu ton salut,
31 que tu as préparé face à tous les peuples :
32 lumière pour la révélation aux nations et gloire d’Israël ton peuple."
33 Le père et la mère de l’enfant étaient étonnés de ce qu’on disait de lui.
34 Syméon les bénit et dit à Marie sa mère : "Il est là pour la chute ou le relèvement de beaucoup en Israël et pour être un signe contesté
35 — et toi-même, un glaive te transpercera l’âme ; ainsi seront dévoilés les débats de bien des cœurs."
36 Il y avait aussi une prophétesse, Anne, fille de Phanuel, de la tribu d’Aser. Elle était fort avancée en âge ; après avoir vécu sept ans avec son mari,
37 elle était restée veuve et avait atteint l’âge de quatre-vingt-quatre ans. Elle ne s’écartait pas du temple, participant au culte nuit et jour par des jeûnes et des prières.
38 Survenant au même moment, elle se mit à célébrer Dieu et à parler de l’enfant à tous ceux qui attendaient la libération de Jérusalem.
39 Lorsqu’ils eurent accompli tout ce que prescrivait la loi du Seigneur, ils retournèrent en Galilée, dans leur ville de Nazareth.
40 Quant à l’enfant, il grandissait et se fortifiait, tout rempli de sagesse, et la faveur de Dieu était sur lui.

*

Fin de quarantaine… Quarante jours sont passés : c’est le temps de la purification rituelle prévue par la loi de Moïse : le temps du retour de la jeune accouchée et de son fils dans la société des hommes.

La purification se fera au Temple de Jérusalem. Voilà donc un charpentier de Nazareth, accompagné de sa femme, se rendant au Temple pour présenter à Dieu leur fils premier-né.

Ce sera aussi sa consécration au Seigneur selon le rite qui veut que le premier né soit consacré à Dieu et à son culte. On sait que cette consécration est, depuis la Torah, réservée aux membres de la tribu de Lévi. Les premiers nés des autres tribus d’Israël sont rachetés par une offrande.

En y entrant, Joseph et Marie ont donc acheté dans la cour du Temple deux tourterelles, ou pigeons, pour les offrir en sacrifice, le sacrifice des pauvres — ceux qui sont plus aisés offrent un agneau et un pigeon. On imagine le père tenant les oiseaux à la main, la mère portant dans ses bras le petit enfant.

Sans que l’arrivée de ces étrangers pauvres ne provoque la moindre curiosité des autres fidèles venus là pour prier, ils amènent leur sacrifice. Et les voilà s’en retournant, quand un homme, renommé à Jérusalem pour sa sagesse et sa piété, qu’on appelait Syméon, vient vers eux, contemple le petit enfant et comme poussé par une impulsion — par l’Esprit saint, dit le texte —, le prend dans ses bras.

Puis à haute voix, au milieu du murmure confus des prières que les fidèles adressent à Dieu, il entonne un cantique d’actions de grâce, qui signale à tous cet enfant comme « la lumière des nations et la gloire d’Israël ».

Pour lui, son œuvre est accomplie, l’œuvre de sa vie — à savoir la vigilance dans l’attente de ce jour :

« Maintenant, Maître, c’est en paix, comme tu l’as dit, que tu renvoies ton serviteur.
Car mes yeux ont vu ton salut,
que tu as préparé face à tous les peuples :
lumière pour la révélation aux nations et gloire d’Israël ton peuple. »


*

Une prophétie étrange, qui annonce que par cet enfant l’extension espérée de l’Alliance aux nations, signe du Royaume, va s’accomplir pour la gloire d’Israël, premier porteur de cette Alliance.

Et en même temps, on le sait c'est comme un lieu de passage difficile pour tout le peuple qu’annonce Syméon, la crise d'appartenance du judaïsme fidèle : peut-on croire que Jésus est le Messie ? — puisqu’on sait que l’élargissement sera difficile, comme un accouchement.

Ce n’est pas sans rapport avec cela que Luc insistera sur la soumission de Jésus et de ses parents à la Loi (le respect de la Loi sera mentionné 5 fois dans ce bref passage).

À ce point, Marie est comme la figure du peuple croyant, du peuple du carrefour représenté en Jésus : « Il est là pour la chute ou le relèvement de beaucoup en Israël et pour être un signe contesté — et toi-même, un glaive te transpercera l’âme ; ainsi seront dévoilés les débats de bien des cœurs, » dit le vieux prophète à Marie.

C’est que la nature humaine n'accueille pas le Christ sans qu'il ne suscite une crise profonde.

La chute et le relèvement annoncés par Syméon sont alors non pas les attitudes de deux camps opposés, mais la réalité des chutes et du relèvement dans une même vie : en premier lieu pour Marie, pour le peuple d'Israël, pour toute femme et tout homme, à la fois pécheur, et donc soumis à la Loi qui le façonne selon la volonté de Dieu, et croyant, juste par la seule grâce.

Avec, pour Marie, qui médite tout ce qui advient, l’annonce de son déchirement à la Croix, bien sûr. Car les moments de carrefour sont des déchirures, et ne sont pas que des déchirures intérieures. Les déchirures de l’histoire, comme des déchirures d’outres éclatées par le vin nouveau, se traduisent hélas généralement par des violences concrètes.

Le monde nouveau dessiné par la Loi de Dieu et ses témoins les prophètes, advient porté par l’Esprit qui pousse ses témoins dans un temps qui pressent que le monde nouveau le verra tout perdre — seuls les prophètes savent ce qu’il va y gagner.

La Loi et l'Esprit — l'Esprit qui meut les prophètes —, la Loi et l'Esprit qui accompagnent Syméon, Anne, les parents de Jésus, ne sont alors pas deux réalités en conflit ou des alternatives.

*

Quatre personnages différents, autour de l'enfant, du Fils de Dieu. Leur vie quotidienne est ce qu’elle est : ses joies, ses peines, ses labeurs. Et par l'Esprit Saint, ils comprennent et confessent, dans le Temple, que le salut a fait irruption dans leur vie.

Cela pourrait ressembler à un culte de paroisse ordinaire… Le culte : des paroissiens d'âges, d'expériences et d'origines diverses, qui ne se connaissent pas nécessairement et ne se sont pas choisis, mais qui, appelés ensemble par l'Esprit, éclairés par lui, confessent de vive voix : « Nos yeux ont vu ton salut ».

Si après les fêtes de ce monde et leurs désillusions, tandis que s’éloignent les chants de Noël et la louange des bergers ; s’il reste à chacun de nous quelque chose du retour sur soi de Marie, qui « retenait tous ces événements en en cherchant le sens » — s’il subsiste en chacun de nous cette vraie part de Noël, alors nous pouvons entrer dans la suite des temps avec cette parole de Syméon : « mes yeux ont vu ton salut ».

Nous pouvons y entrer avec confiance face à tout ce que cela pourra amener d’inattendu dans notre histoire et dans nos jours.

Un fils nous est né, un enfant nous a été donné — signe bien plus humble que les chœurs angéliques de Noël. Et c’est cela qui nous reste, pour que notre méditation puisse recevoir la parole du prophète Syméon : « mes yeux ont vu ton salut », en vue d’une nouvelle louange, tournée vers l’avenir, celle d’Anne la prophétesse — « célébrant Dieu et à parlant de l’enfant à tous ceux qui attendaient la libération de Jérusalem »


RP, Poitiers, 27.12.20
Voir ici : Liturgie :: :: Prédication (PDF)


dimanche 20 décembre 2020

Fruit de la grâce




2 Samuel, 7, 1-16 ; Psaume 89 ; Romains 16, 25-27 ; Luc 1, 26-38

Luc 1, 26-38
26 Le sixième mois, l'ange Gabriel fut envoyé par Dieu dans une ville de Galilée du nom de Nazareth,
27 à une jeune fille accordée en mariage à un homme nommé Joseph, de la famille de David ; cette jeune fille s'appelait Marie.
28 L'ange entra auprès d'elle et lui dit : « Sois joyeuse, toi qui as la faveur de Dieu, le Seigneur est avec toi. »
29 À ces mots, elle fut très troublée, et elle se demandait ce que pouvait signifier cette salutation.
30 L'ange lui dit : « Sois sans crainte, Marie, car tu as trouvé grâce auprès de Dieu.
31 Voici que tu vas être enceinte, tu enfanteras un fils et tu lui donneras le nom de Jésus.
32 Il sera grand et sera appelé Fils du Très-Haut. Le Seigneur Dieu lui donnera le trône de David son père ;
33 il régnera pour toujours sur la famille de Jacob, et son règne n'aura pas de fin. »
34 Marie dit à l'ange : « Comment cela se fera-t-il puisque je n'ai pas de relations conjugales ? »
35 L'ange lui répondit :
« L'Esprit Saint viendra sur toi
et la puissance du Très-Haut te couvrira de son ombre ;
c'est pourquoi celui qui va naître sera saint et sera appelé Fils de Dieu.
36 Et voici qu'Élisabeth, ta parente, est elle aussi enceinte d'un fils dans sa vieillesse et elle en est à son sixième mois, elle qu'on appelait la stérile,
37 car rien n'est impossible à Dieu. »
38 Marie dit alors : « Je suis la servante du Seigneur. Que tout se passe pour moi comme tu me l'as dit ! » Et l'ange la quitta.

*

« Sois joyeuse, toi qui as la faveur de Dieu… » Qui est la jeune femme qui reçoit cette parole ? Une inconnue. Elle ne demeure pas dans les palais d’Hérode. Elle ne convoite rien de cet ordre-là ni une future célébrité hypothétique. Et elle restera inconnue pour longtemps.

« Réjouis-toi, toi qui as la faveur de Dieu… » Quelle est cette faveur ? Pas la gloire, mais quelque chose qui a tout pour ne pas réjouir une jeune femme vierge, tout particulièrement en son temps : cette faveur, cette grâce, est celle de devenir fille-mère !

Grâce terrible, dont il lui est demandé sans détour, avant même qu’elle ne sache ce dont il s’agit, de se réjouir ! Quelle amertume ne pourrait-elle pas ressentir à la parole qui suit : « tu sera enceinte », amertume comme celle d’une sombre ironie !

Mais oh surprise, la jeune femme semble à des lustres de l’amertume — qui nous pousse si facilement à récriminer… Un regard sur la jeune femme de Galilée est propre à renverser l’ironie amère qu’elle nous semblerait avoir dû ressentir.

La voix de l’ange qui invite Marie à se réjouir retentit jusqu’aujourd’hui pour chacun de nous, lorsque Dieu nous confie sa faveur, aussi étrange soit-elle ! Quoiqu’il nous confie, il nous l’annonce en ces termes : « Réjouis-toi… », de quelque faveur qu’il te charge. Réjouis-toi : en cela-même le Seigneur est avec toi. Recevoir comme une grâce ce que Dieu nous confie, qui n’a pas toujours à première vue l’allure d’une route de gloire — quand nous sommes portés à récriminer pour peu que cela tarde.

Ce que Dieu nous confie, c’est sa parole, qui seule fait advenir sa promesse. Sois joyeuse : cette parole, on le comprend est adressée aussi à l’Église, et crée l’Eglise, malgré nos impatiences qui risquent de tout froisser. C’est encore ce que nous dit ce qui arrive à cette jeune femme — sa grossesse, a priori un drame à l’époque. Mais là naît l’Église. Mieux, là naît celui pour qui est l’Église, celui en qui naît l’Église.

La jeune femme, elle, qui ne sait pas encore cela, est troublée, nous dit le texte, elle s’interroge sur le sens de cette salutation.

Et l’ange redit : « tu as trouvé grâce auprès de Dieu » puis continue : « Voici que tu vas être enceinte, tu enfanteras un fils ». Fille-mère pour cette fiancée — le texte a mentionné Joseph —, telle est la grâce qu’elle reçoit d’une parole qui engendre ce qu’elle annonce. La parole « crée » la grossesse, la parole de Dieu dite par l’ange est une citation (Genèse 16, 11) : « Voici que tu es enceinte et tu vas enfanter un fils ».

Futur ? Présent ? La parole qui crée est au-delà du temps. « Que la lumière soit, et la lumière fut » / littéralement « et la lumière était » — tu vas être enceinte, tu es enceinte, et tu vas enfanter. La même parole qui est féconde de la lumière qu’elle annonce (et que rappellent nos bougies de l’Avent comme la fête de Hanoukka) — la même parole est féconde de l’enfant qui va en naître. Elle est féconde aussi de l’acquiescement de Marie qui va suivre ce que la parole a créé en elle : « qu’il me soit fait selon ta parole ».

Ce « oui » — « qu’il me soit fait selon ta parole » — est lui-même don de la même parole de Dieu qui fait advenir le Fils éternel de Dieu à son humanité et fruit de l'Esprit saint qui « couvrira » Marie « de son ombre », il n’en est pas la condition. La parole qui crée l’humanité du Christ crée aussi, précède infiniment, le « oui » de Marie.

Un « oui » qui n’en est que plus remarquable. Dans ce oui est déjà l’épée qui lui transpercera l’âme que va bientôt annoncer à Marie le prophète Syméon (Luc 2). Car avant que ne se réalise la promesse que vient de lui faire l’ange — ton fils auquel tu donneras le nom de Jésus « sera grand et sera appelé Fils du Très-Haut. Le Seigneur Dieu lui donnera le trône de David son père ; il régnera pour toujours sur la famille de Jacob, et son règne n'aura pas de fin » — avant que ne se réalise cette promesse, le jour de la gloire qui consacrera aussi la grandeur de ce que vit Marie — avant cela, c’est d’un chemin de douleur qu’il s’agit d’abord.

Ce « oui » est l’acceptation de la douleur à venir, la douleur des épreuves qui accompagnent tout chemin de vie d’une mère, la douleur, dont elle ne sait pas encore ce qu’elle sera, pour elle terrible — « une épée te transpercera l’âme » —, de voir son fils humilié, calomnié par le monde entier, traité comme criminel, torturé et crucifié pour cela. L’acceptation de cet avenir qu’elle ne connaît pas encore est dans le oui de Marie — « qu’il me soit fait selon ta parole ».

Après viendra la plénitude la joie, la reconnaissance du rôle unique de celle que Calvin nomme à plusieurs reprises « Notre Dame », lui qui, comme Luther, ne remet nullement en cause ni ce qui concerne la virginité de la jeune femme, ni l’immensité de ce qui lui arrive et qui en fait la mère de son Seigneur, la mère de son Dieu ! Grand mystère que Calvin ne conteste nullement tout en préférant que l’on utilise l’expression « mère du Seigneur », comme pour rejoindre l’humilité de celle qui répond par un simple « oui » à ce qui lui arrive de terrible en vérité.

Un « oui », donc, qui exclut par avance toute récrimination, précisément parce qu’il est chargé d’une radicale humilité.

Elle ne prétend à rien. C’est la force de Dieu, selon le nom « Gabriel » donné au messager céleste — car nul ne peut voir Dieu, on n’en perçoit que l’Ange, le messager —, c’est donc la force de Dieu, toute de douceur, qui seule agit ; la force d’une parole énoncée dans l’intimité et non pas devant de vastes auditoires. Fût-elle prononcée devant des foules, elle n’en aurait pas plus de force, celle qui bouleverse l’âme dans l’intimité — « ma grâce te suffit, car ma puissance s’accomplit dans la faiblesse » (2 Corinthiens 12).

La parole qui a bouleversé le monde, qui a fait advenir le Royaume espéré depuis des siècles dans le sein d’une jeune fille, parole indicible, parole silencieuse, est la force de Dieu.

C’est de cette façon que Dieu crée le monde nouveau, par une humble parole prononcée dans la plus intime des intimités, une parole qui loin de toute amertume ou récrimination, fait dire à celle qui l’a reçue « qu’il me soit fait selon ta parole », quoiqu’il advienne. Quant à l’amertume que porte l’étymologie de son nom, Marie, elle en connaîtra la nature profonde, au pied de la Croix, quand sa foi la voit alors déjà changée en douceur infinie, écho de son « oui », « qu’il me soit fait selon ta parole » — qu’il me soit fait selon ce qui est déjà advenu en moi, ce que ta parole a déjà accompli en moi !


RP, Poitiers, 4e dimanche de l'Avent, 20.12.20
Voir ici : Déroulement du culte / chants (PPT)
En PDF : culte en entier :: :: Prédication


dimanche 13 décembre 2020

Lumière dans l'humilité




Ésaïe 61, 1-11 ; Luc 1, 46-55 ; 1 Thess 5, 16-24 ; Jean 1, 6-8 & 19-26

Luc 1, 46-55
46 Et Marie dit : Je magnifie le Seigneur,
47 je suis transportée d’allégresse en Dieu, mon Sauveur,
48 parce qu’il a porté les regards sur l’abaissement de sa servante. Désormais, en effet, chaque génération me dira bienheureuse,
49 parce que le Puissant a fait pour moi de grandes choses. Son nom est sacré,
50 et sa compassion s’étend de génération en génération sur ceux qui le craignent.
51 Il a déployé le pouvoir de son bras ; il a dispersé ceux qui avaient des pensées orgueilleuses,
52 il a fait descendre les puissants de leurs trônes, élevé les humbles,
53 rassasié de biens les affamés, renvoyé les riches les mains vides.
54 Il a secouru Israël, son serviteur, et il s’est souvenu de sa compassion
55 – comme il l’avait dit à nos pères – envers Abraham et sa descendance, pour toujours.

Jean 1, 6-8 & 19-28
6 Il y eut un homme, envoyé de Dieu : son nom était Jean.
7 Il vint en témoin, pour rendre témoignage à la lumière, afin que tous croient par lui.
8 Il n'était pas la lumière, mais il devait rendre témoignage à la lumière.
[…]
19 Et voici quel fut le témoignage de Jean lorsque, de Jérusalem, les Judéens envoyèrent vers lui des prêtres et des lévites pour lui poser la question : "Qui es-tu ?"
20 Il fit une déclaration sans restriction, il déclara : "Je ne suis pas le Christ."
21 Et ils lui demandèrent : "Qui es-tu ? Es-tu Élie ?" Il répondit : "Je ne le suis pas." - Es-tu le Prophète ?" Il répondit : "Non.
22 Ils lui dirent alors : "Qui es-tu ?… que nous apportions une réponse à ceux qui nous ont envoyés ! Que dis-tu de toi-même ?"
23 Il affirma : "Je suis la voix de celui qui crie dans le désert : Aplanissez le chemin du Seigneur, comme l'a dit le prophète Ésaïe."
24 Or, ceux qui avaient été envoyés, des Pharisiens,
25 continuèrent à l'interroger en disant : "Si tu n'es ni le Christ, ni Élie, ni le Prophète, pourquoi baptises-tu ?"
26 Jean leur répondit : "Moi, je baptise dans l'eau. Au milieu de vous se tient celui que vous ne connaissez pas ;
27 il vient après moi et je ne suis même pas digne de dénouer la lanière de sa sandale."
28 Cela se passait à Béthanie, au-delà du Jourdain, où Jean baptisait.

*

Deux figures bibliques d'humilité : Jean le Baptiste, Marie de Nazareth.

Jean. Les rumeurs persistantes sur son compte — « est-il le Christ ? Élie ? Le Prophète attendu ? » — ont tout pour l’encourager à céder à la tentation de la grandeur. Pensez : Jean grand prophète ! On lui reconnaît, Jésus lui-même la lui reconnaîtra, une fonction qui s’inscrit dans la lignée d’une parole du prophète Malachie qui annonçait la venue future d’Élie, ce prophète qui avait été enlevé au ciel !

Alors, Jean, nouvel Élie ? Oh, allez, peut-être pas forcément, pour tous, un ange descendu du ciel, mais simplement un précurseur semblable à l’Élie de Malachie, au message de l’Élie de Malachie. Voilà qui n’est déjà pas mal : un homme envoyé de Dieu, dit le texte-même que nous avons lu. Cela pourrait s’interpréter dans ce sens…

Être céleste Jean ? Il n’a pas cette prétention : lui est l’homme de la terre, du désert, simple messager du repentir, de l’aplanissement du chemin où va passer un autre ; un simple témoin, témoin de la lumière, d’une lumière qui le dépasse de tout l’infini qui est entre celui qui vient du ciel précisément, cette lumière, et lui, Jean, qui, comme tous les témoins, n’est que poussière du désert, et signe d’une lumière si puissante que l’ombre seule en fait deviner la source.

On ne regarde pas la lumière du soleil en plein soleil. On ne sait même pas de quel point du ciel elle vient tant elle est intense. On sait d’où elle vient en regardant l’ombre qu’elle projette derrière un simple témoin — au sens où l'on parle d'un bâton planté au sol. Jean est ce témoin. Il sait ne produire que de l’ombre ; mais qui montre l’origine de la lumière.

La lumière vient du point exactement inverse à l’ombre que projette le témoin. C’est cela Jean : le témoin de la terre, indiquant a contrario la lumière du ciel, depuis l’ombre qu’elle projette par lui. Le témoin le désert apparaît avant la lumière, avant qu’on ne perçoive la source de la lumière, mais la lumière l’a précédé. Il n’apparaît d’abord, que parce que la lumière l’a précédé. Il n’apparaît qu’en contraste à une lumière qui le déborde infiniment, et qu’on ne voit pas en elle-même parce qu’elle éblouit. Le témoin renvoie à elle. Mais sans lumière, il ne serait jamais apparu. Invisible dans les ténèbres. « Il vient après moi, mais il était avant moi », dit Jean de Jésus.

Là apparaît pleinement le grand rôle de Jean : être l’ombre qui fait paraître la lumière. N’être visible que comme ombre de la lumière. Là est toute la mission et la prédication de Jean : être simple ombre, pour faire apparaître la lumière. Ou, pour le dire dans les termes d’Ésaïe, qu’il cite : aplanir le chemin du Seigneur qui vient, Jésus, la Parole éternelle : quiconque s’abaisse jusqu’à jouer son vrai rôle d’ombre-témoin est signe du Christ ; mais qui s’élève, s’exalte et se prétend lumineux, se prétend brillant, est obstacle sur le chemin, détourneur de lumière, qui pour cela vit nécessairement dans les ténèbres.

J’exalte ma piété, mon savoir, mon éloquence, ma beauté, ma richesse, mes titres, prophétiques ou autres ? — autant de pâles loupiotes en regard de la lumière de celui qui est lumière. Je veux que ces loupiotes brillent ? je cherche donc nécessairement à vivre dans les ténèbres puisque je veux que tout cela se voit, alors que tout cela, qui n’est qu’autant de faibles bougies, ne se voit pas, justement, sous la lumière éclatante du soleil dans le désert de ma vie : si une faible bougie doit briller, il lui faut du sombre, il ne faut pas qu’elle soit allumée en plein jour…

Jean a choisi : s’effacer ; plus que de briller, être l’ombre, pour vivre dans la lumière, être l’ombre de la lumière, l’ombre qui dévoile la lumière : c’est de cette façon qu’il peut aplanir le chemin du Seigneur : en se sachant indigne d’en dénouer les sandales. Même sa prédication et son geste sublime, son baptême, sont l’ombre de la lumière. À combien plus forte raison les nôtres, nos gestes. C’est le baptême administré de façon invisible, comme un souffle, Esprit soufflé par le Christ, qui sauve — et point les bains et autres ablutions que seules peuvent administrer les hommes. Comme le dit Jean, nous n’avons de pouvoir que celui de répandre de l’eau, pas de communiquer l’Esprit.

De même, c’est la Parole éternelle, créatrice de l’univers, cette Parole devenue chair, Jésus, qui peut sauver — et point nos paroles, aussi remarquables sembleraient-elles, que peuvent proférer nos bouches enténébrées.

On pourrait dire cela de tous les aspects glorieux, croyons-nous, de nos vies : autant de possibles abats-jours visant sans le savoir toujours clairement, à voiler le Christ… Alors aujourd’hui, que l’attente de Dieu donne à chacun de nous de devenir un peu une ombre, l’humble ombre du soleil magnifique que nous pourrons ainsi fêter et accueillir dignement. Que Dieu nous accorde cette joie : être ainsi vraiment de la fête qui est d'être appelés à devenir enfants de Dieu dans la lumière que nous attendons à Noël.

*

Marie. « Magnificat » — chante-t-elle. Voilà la seule prière de Marie qui nous est proposée : le Magnificat — d’après son premier mot en latin : « mon âme magnifie le Seigneur » (v. 46). Une prière d'humilité — ce n'est pas elle qu'elle magnifie, mais son Seigneur —, dans une prière reprise, comme toutes les prières du Nouveau Testament, des chants bibliques, Psaumes et chants de louange.

Pour le lecteur de l’Église primitive, dont la Bible est celle d'Israël, le Cantique de Marie rappelle en effet irrésistiblement le Cantique d'Anne (1 Samuel 2, 1-10), face au Dieu de tous les impossibles. Car voilà que Dieu intervient ! Nous menant avec Marie à l'émerveillement et à l'humilité : on croirait savoir que les stériles n'enfantent pas, non plus que les vierges ; on croirait savoir que les morts ne ressuscitent pas et que les pains ne se multiplient pas pour les pauvres ! Et voilà que Dieu intervient !

On se souvient alors, et c’est scellé dans les Évangiles de l'enfance, que Marie va donner naissance à un enfant, présenté comme descendant royal de David, fils de Jessé — ou Isaï —, dont le vieux tronc, comme le dit un de nos chants citant la Bible, porte le Messie fils de David.

C'est ce que signifie notre arbre de Noël, figure de l'arbre de Jessé et reprise de l'arbre de toute la création que Dieu fait croître à sa rencontre.

Arbre de Jessé qui porte le Messie, pour dire le chant de toute la création tournée vers la rencontre de la lumière à laquelle elle est appelée.

Un antique symbole que cet arbre, repris dans l'Alsace protestante pour lui donner comme autre sens la vérité du 25 décembre, ancienne date du solstice d'hiver devenu symbole de la naissance du Christ.

Un arbre qui se dresse vers la lumière annoncée par l'étoile des Mages de Matthieu, comme celui de la famille de Jessé et de David vers le Messie, et celui de toute la création vers son salut.

Cela en passant par la faute même qu'il s'agit de couvrir, symbolisée par les boules des arbres de Noël, qui sont au départ simplement des pommes stylisées - pommes (malum en latin), pommes du bien et du mal, mal (malum aussi en latin)…

Le mal englouti, comme sous la neige, par le Christ, dans la lumière, qui dès lors parcourt toute la création, lumière figurée par les guirlandes de lumière qui courent dans tout l'arbre…

C’est au pied de cet arbre que retentit le Cantique de Marie, Le Magnificat ! Cantique pour le moins renversant, en tout cas pour ceux qui se trouvent élevés en dignité du haut de leur trône (v. 52), ou en richesse du haut de leur rassasiement (v. 53). Voilà une parole qui bouscule.

Le Magnificat s'inscrit ainsi dans la lignée des libérations opérées par le Dieu fort à l'égard des humiliés ; le Dieu qui fait germer les délivrances, comme dans le sein vierge de Marie. Et c'est de cela qu’elle se réjouit : dans une joie qui sera proclamée, dit-elle (v. 48), par toutes les générations parce qu’il a porté les regards sur l’abaissement de sa servante, elle exulte d'être la mère de ce Messie libérateur des humiliés, et qui pour cela nous rejoint dans l'humilité dont témoignent Jean et Marie : l'humilité, cette fois, de l'enfant dans lequel la Parole éternelle est devenue chair.


R.P., Châtellerault, 3e dimanche de l'Avent, 13.12.20
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dimanche 6 décembre 2020

"Que tous arrivent à la repentance"




Ésaïe 40, 1-11 ; Psaume 85 ; 2 Pierre 3, 8-14 ; Marc 1, 1-8

2 Pierre 3, 8-14
8 Mais il est une chose, bien-aimés, que vous ne devez pas ignorer, c’est que, devant le Seigneur, un jour est comme mille ans, et mille ans sont comme un jour.
9 Le Seigneur ne tarde pas dans l’accomplissement de la promesse, comme quelques-uns le croient ; mais il use de patience envers vous, ne voulant pas qu’aucun périsse, mais voulant que tous arrivent à la repentance.
10 Le jour du Seigneur viendra comme un voleur ; en ce jour, les cieux passeront avec fracas, les éléments embrasés se dissoudront, et la terre avec les œuvres qu’elle renferme sera consumée.
11 Puisque donc toutes ces choses doivent se dissoudre, quelles ne doivent pas être la sainteté de votre conduite et votre piété,
12 tandis que vous attendez et hâtez l’avènement du jour de Dieu, à cause duquel les cieux enflammés se dissoudront et les éléments embrasés se fondront !
13 Mais nous attendons, selon sa promesse, de nouveaux cieux et une nouvelle terre, où la justice habitera.
14 C’est pourquoi, bien-aimés, en attendant ces choses, appliquez-vous à être trouvés par lui sans tache et irrépréhensibles dans la paix.

Marc 1, 1-8
1 Commencement de l’Évangile de Jésus-Christ, Fils de Dieu.
2 Selon ce qui est écrit dans Ésaïe, le prophète : Voici, j’envoie devant toi mon messager, Qui préparera ton chemin ;
3 C’est la voix de celui qui crie dans le désert : Préparez le chemin du Seigneur, Aplanissez ses sentiers.
4 Jean parut, baptisant dans le désert, et prêchant le baptême de repentance, pour la rémission des péchés.
5 Tout le pays de Judée et tous les habitants de Jérusalem se rendaient auprès de lui ; et, confessant leurs péchés, ils se faisaient baptiser par lui dans le fleuve du Jourdain.
6 Jean avait un vêtement de poils de chameau, et une ceinture de cuir autour des reins. Il se nourrissait de sauterelles et de miel sauvage.
7 Il prêchait, disant : Il vient après moi celui qui est plus puissant que moi, et je ne suis pas digne de délier, en me baissant, la courroie de ses souliers.
8 Moi, je vous ai baptisés d’eau ; lui, il vous baptisera du Saint-Esprit.

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Dans le désert, Jean le Baptiste, référant à Ésaïe, prêche la repentance — dans l'espérance d'un prochain don de l’Esprit saint par le Messie attendu. Le baptême de Jean n'est pas celui de Jésus. C'est le geste qui porte un appel à se repentir de ce qui souille. D'où ce lavement symbolique qu'est le baptême — qui sera par la suite investi d'un nouveau contenu…

Quand ?… « Jean a baptisé d’eau, mais vous, dans peu de jours, vous serez baptisés du Saint-Esprit », annoncera Jésus au moment de son départ, au jour de l’Ascension. Comment est interprétée la prophétie du Baptiste citée ce jour-là par Jésus ? Écoutons la suite : « Alors les apôtres réunis lui demandèrent : Seigneur, est-ce en ce temps que tu rétabliras le royaume d’Israël ? » Jésus parle du don de l’Esprit saint, les disciples entendent l’instauration du Royaume, attendue donc d’un moment à l’autre. « Il leur répondit : Ce n’est pas à vous de connaître les temps ou les moments que le Père a fixés de sa propre autorité » (Actes 1, 5-7).

« Un jour est comme mille ans, et mille ans sont comme un jour », dira l’épître de Pierre citant le Psaume 90… Du cœur de la nuit.

On retrouve la même problématique que chez les douze, chez les disciples de Thessalonique s’interrogeant sur le sort de ceux qui sont décédés avant l’instauration du Royaume. Paul leur répondait — 1 Th 4, 13-14 & 1 Th 5, 1-2   : « Nous ne voulons pas, frères et sœurs, que vous soyez dans l’ignorance au sujet de ceux qui dorment, afin que vous ne vous affligiez pas comme des gens qui n’ont point d’espérance. Car, si nous croyons que Jésus est mort et qu’il est ressuscité, croyons aussi que Dieu ramènera par Jésus et avec lui ceux qui sont morts. […] Consolez-vous donc les uns les autres par ces paroles. » 1 Th 5, 1-2 : « Pour ce qui est des temps et des moments, vous n’avez pas besoin, frères, qu’on vous en écrive. Car vous savez bien vous-mêmes que le jour du Seigneur viendra comme un voleur dans la nuit. »

La 2e épître aux Thessaloniciens viendra rassurer ceux qui trouvent que le temps dure un peu trop quand même. Une génération est près d'être passée… Mais où est donc le Royaume ?

2 Pierre 3, 8-9 — nous l’avons entendu, se trouve dans la même ligne. Rassurer, apprendre la patience : « il est une chose, bien-aimés, que vous ne devez pas ignorer, c’est que, devant le Seigneur, un jour est comme mille ans, et mille ans sont comme un jour. Le Seigneur ne tarde pas dans l’accomplissement de la promesse, comme quelques-uns le croient ; mais il use de patience envers vous, ne voulant pas qu’aucun périsse, mais voulant que tous arrivent à la repentance. »

Cela en réponse à la question : pourquoi est-ce si long ? Pourquoi la nuit est-elle si longue ? La réponse renvoie au temps de Dieu : « devant le Seigneur, un jour est comme mille ans, et mille ans sont comme un jour »

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2 Pierre 3, 3-7, juste avant les mots que nous avons lus : « il viendra des moqueurs avec leurs railleries, marchant selon leurs propres convoitises, et disant : Où est la promesse de son avènement ? Car, depuis que les pères sont morts, tout demeure comme dès le commencement de la création. Ils veulent ignorer, en effet, que des cieux existèrent autrefois par la parole de Dieu, de même qu’une terre tirée de l’eau et formée au moyen de l’eau, et que par ces choses le monde d’alors périt, submergé par l’eau, tandis que, par la même parole, les cieux et la terre d’à présent sont gardés et réservés pour le feu, pour le jour du jugement. »

L’impression commune, qui nous affecte tous, est que les choses qui ont duré sont immuables ! Et donc que la nuit ne cessera pas. Jean prêchait bien dans le désert.

Petite digression : dans le désert, celui de l’Utah cette fois, on vient de trouver, puis de voir disparaître, un monolithe évoquant 2001, Odyssée de l'espace, un film, remontant à 1968, qui voit apparaître aux origines de l’humanité un monolithe similaire, que dans le film on retrouve ensuite sur la Lune. Arthur C. Clarke, scientifique et auteur célèbre de science-fiction (dont les cendres vont être prochainement envoyées sur Lune à leur tour, dans le cadre d’un convoi funéraire en projet : envoyer les cendres de défunts sur la Lune) — A. C. Clarke, qui a inspiré le film au réalisateur Stanley Kubrick, écrit ensuite, en 1982, 2010 : Odyssée deux.

En résumé, dans 2010 : Odyssée deux, suite de 2001, Américains et Soviétiques sont en mission spatiale commune. En 2010, dans un monde où la guerre froide est toujours d'actualité (le livre est écrit 7 ans avant la chute du mur de Berlin), des astronautes américains partent avec une équipe soviétique à bord d’un vaisseau spatial soviétique, alors que sur Terre les tensions sont au maximum et que la guerre américano-soviétique est sur le point d'éclater… Pourquoi est-ce que je cite cela ? Parce qu’en 1982, il est impossible pour le scientifique compétent qu’est A. C. Clarke d’imaginer qu’en 2010 l’Union soviétique n’existera plus…

Rappelons-nous, pour ceux d’entre nous qui étions déjà adultes en 1982 : l’Union soviétique était perçue comme inébranlable. Évidemment qu’elle existerait encore en 2010 ! Nous étions nés avec (pour ceux qui sont nés après 1922), nous mourrions avec…

C’était ne pas compter avec ce que « devant le Seigneur, un jour est comme mille ans, et mille ans sont comme un jour »… Et que dire des grands empires de l’Antiquité, engloutis dans les sables après avoir duré parfois des millénaires ?…

Eh bien la parole de sagesse du Psaume 90 et de la 2e épître de Pierre, qui valait pour les empires antiques et les désormais anciens empires modernes, vaut toujours. Remonterait-il au Moyen Âge ou même avant, un empire, ou autre système du monde, est du temps, passager, comme tout empire ou système du temps humain, qui n’est pas le temps de Dieu. Ça vaut pour ce que nous vivons en nos temps. « Devant le Seigneur, un jour est comme mille ans, et mille ans sont comme un jour »

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Ici l’épître poursuit : « Le Seigneur ne tarde pas dans l’accomplissement de la promesse, comme quelques-uns le croient ; mais il use de patience envers vous, ne voulant pas qu’aucun périsse, mais voulant que tous arrivent à la repentance. » (2 P 3, 9). Voilà une autre lecture du temps de Dieu : le temps de Dieu comme temps de sa patience, un temps pour nous ! Où l’on retrouve la prédication du Baptiste : « repentez-vous » ! C’est tout ce qu’il en est nous concernant : « repentez-vous », c’est à dire littéralement : tournez-vous, tournez les yeux vers le Seigneur, et détournez-vous de vos comportements qui vous enferrent loin de Dieu.

Détournez-vous de tout ce qui vous nuit et vous cantonne loin du Royaume. Quant au don de l’Esprit saint, qui rend le Royaume présent au milieu de vous, c’est le don de celui qui vient et pour qui mille ans sont comme un jour et un jour comme mille ans. Le jour de sa parousie, le jour de la résolution des nœuds de l’Histoire est proche dans le temps de Dieu, quelle que soit l’extension du temps humain. Si proche qu’il est déjà là, dans le don de l’Esprit saint, dans ta bouche et dans ton cœur, présent au milieu de vous. Pour vous, pour nous, dans l’espace du temps humain, et selon le don de l’Esprit saint, vous êtes dans le temps de la patience, où aujourd’hui encore est lancé l’appel du Baptiste — aujourd’hui encore il est temps : « repentez-vous » ! C’est à dire : revenez à moi, détournez-vous de ce qui vous éloigne de moi.

C’est l’honneur d’un homme, d’une femme, d’une Église, d’un peuple, de savoir se repentir d’avoir manqué d’intelligence empathique et sombré dans l’aveuglement d’un cœur orgueilleux. Il est encore temps de se tourner vers le Seigneur de lumière dans l’espérance de son « Esprit de sagesse et d'intelligence, Esprit de conseil et de force, Esprit de connaissance et de crainte de l'Éternel » (Ésaïe 11, 2).

Le Seigneur est tout proche, près de toi…


RP, Poitiers, 2e dimanche de l'Avent, 6.12.20
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