1 Rois 17, 17-24 ; Psaume 10 ; Galates 1, 11-19 ; Luc 7, 11-17
Luc 7, 12-15
Comment un mort peut-il ressusciter ? Comment expliquer ce pouvoir de Jésus ? Peut-on expliquer le pouvoir et la source de la vie ? « Je suis la lumière du monde ; celui qui me suit ne marchera pas dans les ténèbres, mais il aura la lumière de la vie » (Jean 8, 12). On réfléchira à cela en méditant tout d’abord le texte choisi par les monitrices et joué par les enfants, celui de la guérison de l’aveugle-né — particulièrement… éclairant…
Jean 9
Selon une légende juive, l'enfant connaît, avant de naître, tous les mystères, il a toutes les explications. À la naissance, un ange lui ferme la bouche pour qu'il oublie tout ce qu'il sait. Le petit sillon qu'on a sous le nez est la marque du doigt de l'ange.
C’est peut-être là pourquoi les disciples voulaient savoir si c'était parce que lui avait péché (avant de naître — mais comment savoir après le passage du doigt de l’ange ?) ou si c’était parce que ses parents avaient péché que l'homme était né aveugle. La réponse de Jésus sera : ni l’un, ni l’autre ; ni lui, ni ses parents. Mais surtout, que nul ne se croit meilleur que les autres, ou plus éclairé que les aveugles.
Le cinéaste américain Woody Allen cite Job pensant que Dieu lui dit, face à ses souffrances : « où étais-tu quand je créais le monde ? » Selon Woody Allen Job lui rétorque : « ce n'est pas une réponse ! » Et effectivement, s'il s'agit par là d'expliquer la souffrance, ce n'est pas une réponse. La veuve de Naïn devant son fils défunt — elle en proie non seulement au deuil mais à la détresse d’un lendemain sans ressource — serait bien d’accord ! L'aveugle-né aussi.
Et Jésus les rejoint : pas de raisons pour expliquer l'infirmité, la maladie, etc. : il n'y a pas à chercher d'explication dans tel ou tel péché. D’ailleurs, pas de raisons non plus qui expliquent la guérison : la manifestation des œuvres de Dieu par le miracle n'explique pas plus la grâce que l'antiquité de l’œuvre de Dieu n'explique les souffrances de Job.
Et la veuve de Naïn le sait bien, comme l'aveugle-né qui obtiendra une guérison qui ne peut lui arracher qu'un joyeux « pourquoi moi ? » — équivalent de l'amer « pourquoi lui ? » de quelques religieux présents, tels les amis de Job, et mécontents — ; l'aveugle-né se contentera de constater « j'étais aveugle, maintenant je vois ».
D’emblée, Jésus le soulignera par la méthode choisie pour guérir cet homme : il ne commence pas par lui nettoyer les yeux, par lui faire des proclamations éclairantes, ou lui tenir des propos clair et lumineux. Il lui couvre les yeux de boue, avant de l'envoyer se laver, au bassin de Siloé — de l'Envoyé — (au bassin c’est-à-dire au miqvé de Siloé — miqvé équivalent, dans le judaïsme, à ce qu’on appellerait « baptistère »). — Écoutons Jean 9 :
Tout ça est pour le moins peu clair ! Si Jésus avait voulu insister sur l'aveuglement, il ne s'y serait pas pris autrement : les yeux pleins de boue…
Quelle est notre lumière ? Quelle est notre « connaissance » ? L'aveugle n'est-il pas celui qui se fourvoie dans la prétention d'avoir accédé à une clarté telle que le mystère de Dieu serait devenu pour lui moins opaque ? C'est là le jugement que porte Jésus dans le monde : que ceux qui voient deviennent aveugles, afin de voir, car il n'est pas de grâce dans nos sagesses, fût-ce notre sagesse religieuse : Dieu ne les a-t-il pas frappées de folie (1 Corinthiens 1, 20) ?
Jean 9 :
La lumière de Dieu est celle qui éblouit, qui aveugle celui qui ainsi, confesse sa cécité. C'est cette lumière que porte Jésus, sagesse mystérieuse et cachée, que le monde ne reçoit pas, scandale et folie.
Qui prétend être éclairé par Dieu et n'en est pas aveuglé, aveuglé au point d'en perdre toute capacité de se sentir en supériorité par rapport à quiconque, fût-ce en supériorité religieuse — celui que la lumière de Dieu n'aveugle pas à ce point !... Est-ce bien la lumière de Dieu qu'une lumière si faible ? Tel est le jugement : « que ceux qui ne voient pas voient, et que ceux qui voient deviennent aveugles » (Jean 9, 39).
Voulons-nous expliquer la souffrance de tel ou tel par le péché de ses parents, de son peuple, de lui-même ? Penser cela est ce que Jésus appelle être aveugle à la grâce totalement gratuite. Et manquer la vocation à manifester la gloire de Dieu, qui est de lutter contre ce qui humilie et fait souffrir. C’est arrivé « pour que la gloire de Dieu soit manifestée en lui » !
Où l’on retrouve le doigt de l’ange — suite à la marque duquel on oublie aussi ce pourquoi on est envoyé en ce monde : quelle est notre mission ? La mission de l’aveugle lui est dévoilée lorsqu’il est guéri par le Christ : voir manifester en lui la gloire de Dieu.
Bienheureux ceux dont la relation avec Dieu est d’être éblouis par sa promesse, partant en aveugles vers sa lumière inaccessible. Ceux dont la promesse de Dieu a couvert les yeux de boue, les plaçant sur le chemin de Siloé, envoyés sur le chemin de l'Envoyé de lumière.
Jésus, celui qui peut rendre la vue aux aveugles, peut ainsi nous rendre la vie…
Luc 7, 11-17
Luc 7, 12-15
12 […] Près de la porte de la ville, voici, on portait en terre un mort, fils unique de sa mère, qui était veuve ; et il y avait avec elle beaucoup de gens de la ville.
13 Le Seigneur, l’ayant vue, fut ému de compassion pour elle, et lui dit : Ne pleure pas !
14 Il s’approcha, et toucha le cercueil. Ceux qui le portaient s’arrêtèrent. Il dit : Jeune homme, je te le dis, lève-toi !
15 Et le mort s’assit, et se mit à parler. Jésus le rendit à sa mère.
*
Comment un mort peut-il ressusciter ? Comment expliquer ce pouvoir de Jésus ? Peut-on expliquer le pouvoir et la source de la vie ? « Je suis la lumière du monde ; celui qui me suit ne marchera pas dans les ténèbres, mais il aura la lumière de la vie » (Jean 8, 12). On réfléchira à cela en méditant tout d’abord le texte choisi par les monitrices et joué par les enfants, celui de la guérison de l’aveugle-né — particulièrement… éclairant…
Jean 9
1 En passant, Jésus vit un homme aveugle de naissance.
2 Ses disciples lui posèrent cette question : "Rabbi, qui a péché pour qu’il soit né aveugle, lui ou ses parents ?"
3 Jésus répondit : "Ni lui, ni ses parents. Mais c’est pour que les œuvres de Dieu se manifestent en lui !
*
Selon une légende juive, l'enfant connaît, avant de naître, tous les mystères, il a toutes les explications. À la naissance, un ange lui ferme la bouche pour qu'il oublie tout ce qu'il sait. Le petit sillon qu'on a sous le nez est la marque du doigt de l'ange.
C’est peut-être là pourquoi les disciples voulaient savoir si c'était parce que lui avait péché (avant de naître — mais comment savoir après le passage du doigt de l’ange ?) ou si c’était parce que ses parents avaient péché que l'homme était né aveugle. La réponse de Jésus sera : ni l’un, ni l’autre ; ni lui, ni ses parents. Mais surtout, que nul ne se croit meilleur que les autres, ou plus éclairé que les aveugles.
Le cinéaste américain Woody Allen cite Job pensant que Dieu lui dit, face à ses souffrances : « où étais-tu quand je créais le monde ? » Selon Woody Allen Job lui rétorque : « ce n'est pas une réponse ! » Et effectivement, s'il s'agit par là d'expliquer la souffrance, ce n'est pas une réponse. La veuve de Naïn devant son fils défunt — elle en proie non seulement au deuil mais à la détresse d’un lendemain sans ressource — serait bien d’accord ! L'aveugle-né aussi.
Et Jésus les rejoint : pas de raisons pour expliquer l'infirmité, la maladie, etc. : il n'y a pas à chercher d'explication dans tel ou tel péché. D’ailleurs, pas de raisons non plus qui expliquent la guérison : la manifestation des œuvres de Dieu par le miracle n'explique pas plus la grâce que l'antiquité de l’œuvre de Dieu n'explique les souffrances de Job.
Et la veuve de Naïn le sait bien, comme l'aveugle-né qui obtiendra une guérison qui ne peut lui arracher qu'un joyeux « pourquoi moi ? » — équivalent de l'amer « pourquoi lui ? » de quelques religieux présents, tels les amis de Job, et mécontents — ; l'aveugle-né se contentera de constater « j'étais aveugle, maintenant je vois ».
*
D’emblée, Jésus le soulignera par la méthode choisie pour guérir cet homme : il ne commence pas par lui nettoyer les yeux, par lui faire des proclamations éclairantes, ou lui tenir des propos clair et lumineux. Il lui couvre les yeux de boue, avant de l'envoyer se laver, au bassin de Siloé — de l'Envoyé — (au bassin c’est-à-dire au miqvé de Siloé — miqvé équivalent, dans le judaïsme, à ce qu’on appellerait « baptistère »). — Écoutons Jean 9 :
4 Tant qu’il fait jour, il nous faut travailler aux œuvres de celui qui m’a envoyé : la nuit vient où personne ne peut travailler ;
5 aussi longtemps que je suis dans le monde, je suis la lumière du monde."
6 Ayant ainsi parlé, Jésus cracha à terre, fit de la boue avec la salive et l’appliqua sur les yeux de l’aveugle ;
7 et il lui dit : "Va te laver à la piscine de Siloé" — ce qui signifie Envoyé. L’aveugle y alla, il se lava et, à son retour, il voyait. […]
Tout ça est pour le moins peu clair ! Si Jésus avait voulu insister sur l'aveuglement, il ne s'y serait pas pris autrement : les yeux pleins de boue…
*
Quelle est notre lumière ? Quelle est notre « connaissance » ? L'aveugle n'est-il pas celui qui se fourvoie dans la prétention d'avoir accédé à une clarté telle que le mystère de Dieu serait devenu pour lui moins opaque ? C'est là le jugement que porte Jésus dans le monde : que ceux qui voient deviennent aveugles, afin de voir, car il n'est pas de grâce dans nos sagesses, fût-ce notre sagesse religieuse : Dieu ne les a-t-il pas frappées de folie (1 Corinthiens 1, 20) ?
Jean 9 :
15 […] Les Pharisiens demandèrent à l’aveugle comment il avait recouvré la vue. Il leur répondit : "Il m’a appliqué de la boue sur les yeux, je me suis lavé, je vois."
16 […] Et c’était la division entre eux.
17 Alors, ils s’adressèrent à nouveau à l’aveugle : "Et toi, que dis-tu de celui qui t’a ouvert les yeux ?" Il répondit : "C’est un prophète." […]
34 Ils ripostèrent : "Tu n’es que péché depuis ta naissance et tu viens nous faire la leçon !"; et ils le jetèrent dehors.
35 Jésus apprit qu’ils l’avaient chassé. Il vint alors le trouver et lui dit : "Crois-tu, toi, au Fils de l’homme ?"
36 Et lui de répondre : "Qui est-il, Seigneur, pour que je croie en lui ?"
37 Jésus lui dit : "Eh bien ! Tu l’as vu, c’est celui qui te parle."
38 L’homme dit : "Je crois, Seigneur" et il se prosterna devant lui.
39 Et Jésus dit alors : "C’est pour un jugement que je suis venu dans le monde, pour que ceux qui ne voyaient pas voient, et que ceux qui voyaient deviennent aveugles."
La lumière de Dieu est celle qui éblouit, qui aveugle celui qui ainsi, confesse sa cécité. C'est cette lumière que porte Jésus, sagesse mystérieuse et cachée, que le monde ne reçoit pas, scandale et folie.
Qui prétend être éclairé par Dieu et n'en est pas aveuglé, aveuglé au point d'en perdre toute capacité de se sentir en supériorité par rapport à quiconque, fût-ce en supériorité religieuse — celui que la lumière de Dieu n'aveugle pas à ce point !... Est-ce bien la lumière de Dieu qu'une lumière si faible ? Tel est le jugement : « que ceux qui ne voient pas voient, et que ceux qui voient deviennent aveugles » (Jean 9, 39).
Voulons-nous expliquer la souffrance de tel ou tel par le péché de ses parents, de son peuple, de lui-même ? Penser cela est ce que Jésus appelle être aveugle à la grâce totalement gratuite. Et manquer la vocation à manifester la gloire de Dieu, qui est de lutter contre ce qui humilie et fait souffrir. C’est arrivé « pour que la gloire de Dieu soit manifestée en lui » !
Où l’on retrouve le doigt de l’ange — suite à la marque duquel on oublie aussi ce pourquoi on est envoyé en ce monde : quelle est notre mission ? La mission de l’aveugle lui est dévoilée lorsqu’il est guéri par le Christ : voir manifester en lui la gloire de Dieu.
Bienheureux ceux dont la relation avec Dieu est d’être éblouis par sa promesse, partant en aveugles vers sa lumière inaccessible. Ceux dont la promesse de Dieu a couvert les yeux de boue, les plaçant sur le chemin de Siloé, envoyés sur le chemin de l'Envoyé de lumière.
35 […] "Crois-tu, toi, au Fils de l’homme ?" demande alors Jésus à l’aveugle guéri — en Jean 9…
36 Et lui de répondre : "Qui est-il, Seigneur, pour que je croie en lui ?"
37 Jésus lui dit : "Eh bien ! Tu l’as vu, c’est celui qui te parle."
38 L’homme dit : "Je crois, Seigneur" et il se prosterna devant lui.
Jésus, celui qui peut rendre la vue aux aveugles, peut ainsi nous rendre la vie…
Luc 7, 11-17
11 Le jour suivant, Jésus alla dans une ville appelée Naïn ; ses disciples et une grande foule faisaient route avec lui.
12 Lorsqu’il fut près de la porte de la ville, voici, on portait en terre un mort, fils unique de sa mère, qui était veuve ; et il y avait avec elle beaucoup de gens de la ville.
13 Le Seigneur, l’ayant vue, fut ému de compassion pour elle, et lui dit : Ne pleure pas !
14 Il s’approcha, et toucha le cercueil. Ceux qui le portaient s’arrêtèrent. Il dit : Jeune homme, je te le dis, lève-toi !
15 Et le mort s’assit, et se mit à parler. Jésus le rendit à sa mère.
16 Tous furent saisis de crainte, et ils glorifiaient Dieu, disant : Un grand prophète a paru parmi nous, et Dieu a visité son peuple.
17 Cette parole sur Jésus se répandit dans toute la Judée et dans tout le pays d’alentour.
R.P.
Poitiers, 09.06.13
Poitiers, 09.06.13
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