Proverbes 8, 12-20 & 32-36 ; Psaumes 46 & 63 ; 1 Thessaloniciens, 4, 13-18
Proverbes 8, 12-20 & 32-36
Matthieu 25, 1-13
Voici un texte disant que nous ne savons ni le jour ni l’heure, où Dieu est présenté en futur époux. Et voilà des jeunes filles séduites par cet époux divin, emportée par la séduction de son Esprit, signifié par l'huile des lampes. Séduites, les sages les comme folles.
Elles nous ressemblent toutes, cherchant à combler ce vide que nous connaissons tous et que « seul Dieu peut combler ». Car la sagesse de Dieu dévoile en nous tous ce vide, ce manque de Dieu : qui la sagesse appelle-t-elle d'autre en effet que ceux qui en manquent ?
Nous en manquons pour ne pas savoir que toutes les séductions passagères ne sont qu'autant de signes de ce manque. Au fond, que trouvons-nous d’autre que cet enseignement dans la Bible ?
En une nuit de veille, les dix jeunes filles s'assoupissent. Un assoupissement qui atteint tous les vivants, désignant notre passage en ce monde. Le sommeil cessera d'un moment à l'autre.
Ce texte parle de l'exil et du Royaume — le Royaume, c'est-à-dire la fin annoncée de l'exil : « en ce jour-là, le Royaume des cieux sera semblable à... » Avec un côté tragique, on l'a perçu, ce texte parle de vigilance nécessaire, face à un jour espéré, jour espéré où pourtant l'espérance cesse ; elle prend fin, en parallèle avec la célébration annoncée des noces de l'époux céleste, le mariage spirituel qui marque la fin de l'exil.
Lecture spirituelle du thème de l'exil. De l'exil d'Israël depuis Jérusalem jusqu'à Babylone — où le sens littéral renvoie, au-delà de lui-même, aux réalités célestes. En raccourci, dans cette perspective, à travers le retour à Jérusalem depuis Babylone, nous sommes appelés à revenir à Dieu depuis l'exil dans la chair où nous sommes. De façon symbolique, la Bible parle de ce qui est donc exil spirituel, en termes de Jérusalem, pour la vie avec Dieu, et de Babylone pour l'exil dans le péché et la culpabilité, la douleur.
On l'a déjà perçu — avec cette huile des lampes qui dans la vigilance, représente l'Esprit, — lecture du Nouveau Testament et même, d'ailleurs, des rabbins et au-delà, des prophètes.
Le thème de l'exil en général est récurrent dans la Bible depuis l'exode d’Égypte jusqu'au retour de l'exil babylonien. Et il acquiert très tôt une portée symbolique. Cela dès les temps des Prophètes. C’est de l’exil babylonien qu’il est question, et de ce qu’il signifie, et de l’espérance de sa fin. L’exil a-t-il cessé au temps de Jésus — quand Jean le Baptiste annonce encore sa fin !?
Cette lecture de l’exil dévoile finalement dans toute son intensité le drame réel de l'exil dont la dimension géographique s'avère alors être une expression d'une réalité tout intérieure. La nuit.
La nuit s'est épaissie. L'espérance de la lumière a-t-elle alors disparu ? Et si le cri du milieu de la nuit de veille des dix vierges avait retenti comme cri du dernier martyr, dernière vierge sage, au temps des prophètes où l’esprit soufflait par exemple ? Ou de l’an 70 — autre exemple : où l’on attendait une délivrance et un Royaume, délivrance qui s’est résolue, à l’inverse, par la catastrophe de la destruction du Temple de Jérusalem. On pourrait penser aussi à d’autres dates, d’autres cas, des martyres, advenus plus tard au cœur de catastrophes, de destructions.
Parole terrible que ce : « Je ne vous connais » sur laquelle on s’arrêtera donc.
Si ce cri : « voici l'époux sortez à sa rencontre », n'avait retenti joyeusement, comme cri de délivrance des mains de ses bourreaux, qu'aux oreilles d’un dernier martyr, en 70, d’une dernière vierge sage, alors que sa vie s’échappait des flammes, ou des coups de l’épée, nous laissant à notre désespoir et à notre manque définitif de cette huile, avec nos volontés dérisoires d’en acheter, l’huile et sa flamme, l’Esprit, que venait d’exhaler vers la Jérusalem qui l’accueillait, cette dernière vierge sage et refermait définitivement ses portes sur notre enfer récurrent et infini ?
Si les signes de l’histoire ultérieure de nos malheurs, ne faisant qu’amplifier toujours plus la chaîne indéfinie des malheurs d’antan, n’étaient là que pour confirmer que ce dernier cri annonçant l’époux, annonçant les noces spirituelles réjouissant ce dernier témoin — avait bien retenti, avant nous, depuis 70, pour un silence sans écho jusqu’aux génocides du XXe siècle ?
Si ce dernier avait retenti pour la dernière fois aux oreilles d’un dernier martyr avec la lassitude définitive de Dieu ?
« Je ne vous connais pas », seule parole tragique qui lui succède alors. Seul écho infini dans un désespoir infini…
Il reste à espérer que ce cri définitif n’ait pas déjà retenti, et qu’alors l’autre parole : « veillez donc, puisque vous ne savez ni le jour ni l’heure » nous concerne encore.
L’huile des sages n’est rien d’autre que cette sagesse qui seule rend pleinement disponible à l’époux, qui peut venir d’un moment à l’autre. Les folles simplement, manquent d’huile ; elles ne savent pas être disponibles à l’époux. Et nous, savons-nous être disponibles ? Le temps est si bref.
Sommes-nous disponibles à quoi que nous demande l’époux en attendant, à son service, c’est-à-dire au service de notre prochain pour rendre ce monde plus beau ? Il nous faut alors recevoir l’huile de l’Esprit, ou toutes les joies de la vie comme dons de Dieu en un monde qu’il faudra quitter. Et nul ne sait ni le jour ni l’heure.
Mais dans cette certitude d’un manque que rien ne saurait combler, perce alors le regard de Dieu. Avec cette parole : « Voici l’époux, sortez à sa rencontre » (Mt 25 :6).
Proverbes 8, 12-20 & 32-36
12 Moi, la sagesse, j’ai pour demeure la prudence, Et je sais trouver la connaissance de la réflexion.
13 La crainte de l’Éternel, c’est la haine du mal; L’arrogance et l’orgueil, la voie du mal, Et la bouche perverse, voilà ce que je hais.
14 Le conseil et la raison m’appartiennent; Je suis l’intelligence, la force est à moi.
15 Par moi les rois règnent, Et les princes ordonnent ce qui est juste;
16 Par moi gouvernent les chefs, Les notables, tous les juges de la terre.
17 Moi j’aime ceux qui m’aiment, Et ceux qui me recherchent me trouvent.
18 Avec moi sont la richesse et la gloire, Les biens durables et la justice.
19 Mon fruit est meilleur que l’or, que l’or pur, Et ce que je rapporte (est meilleur) que l’argent de choix.
20 Je marche dans le chemin de la justice, Au milieu des sentiers de la droiture,
32 Et maintenant, mes fils, écoutez-moi; Heureux ceux qui observent mes voies!
33 Écoutez l’instruction, et devenez sages, Ne la négligez pas.
34 Heureux l’homme qui m’écoute, Qui veille de jour en jour à mon seuil, Qui monte la garde près des montants de mes portes!
35 Car celui qui me trouve a trouvé la vie Et obtient la faveur de l’Éternel.
36 Mais celui qui pèche contre moi nuit à son âme; Tous ceux qui me haïssent aiment la mort.
Matthieu 25, 1-13
1 Alors il en sera du Royaume des cieux comme de dix jeunes filles qui prirent leurs lampes et sortirent à la rencontre de l’époux.
2 Cinq d’entre elles étaient insensées/folles et cinq étaient avisées/sages.
3 En prenant leurs lampes, les filles insensées n’avaient pas emporté d’huile ;
4 les filles avisées, elles, avaient pris, avec leurs lampes, de l’huile dans des fioles.
5 Comme l’époux tardait, elles s’assoupirent toutes et s’endormirent.
6 Au milieu de la nuit, un cri retentit : Voici l’époux ! Sortez à sa rencontre.
7 Alors toutes ces jeunes filles se réveillèrent et apprêtèrent leurs lampes.
8 Les insensées dirent aux avisées : Donnez-nous de votre huile, car nos lampes s’éteignent.
9 Les avisées répondirent : Certes pas, il n’y en aurait pas assez pour nous et pour vous ! Allez plutôt chez les marchands et achetez-en pour vous.
10 Pendant qu’elles allaient en acheter, l’époux arriva ; celles qui étaient prêtes entrèrent avec lui dans la salle des noces, et l’on ferma la porte.
11 Finalement, arrivent à leur tour les autres jeunes filles, qui disent : Seigneur, seigneur, ouvre-nous !
12 Mais il répondit : En vérité, je vous le déclare, je ne vous connais pas.
13 Veillez donc, car vous ne savez ni le jour ni l’heure.
*
Voici un texte disant que nous ne savons ni le jour ni l’heure, où Dieu est présenté en futur époux. Et voilà des jeunes filles séduites par cet époux divin, emportée par la séduction de son Esprit, signifié par l'huile des lampes. Séduites, les sages les comme folles.
Elles nous ressemblent toutes, cherchant à combler ce vide que nous connaissons tous et que « seul Dieu peut combler ». Car la sagesse de Dieu dévoile en nous tous ce vide, ce manque de Dieu : qui la sagesse appelle-t-elle d'autre en effet que ceux qui en manquent ?
Nous en manquons pour ne pas savoir que toutes les séductions passagères ne sont qu'autant de signes de ce manque. Au fond, que trouvons-nous d’autre que cet enseignement dans la Bible ?
En une nuit de veille, les dix jeunes filles s'assoupissent. Un assoupissement qui atteint tous les vivants, désignant notre passage en ce monde. Le sommeil cessera d'un moment à l'autre.
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Ce texte parle de l'exil et du Royaume — le Royaume, c'est-à-dire la fin annoncée de l'exil : « en ce jour-là, le Royaume des cieux sera semblable à... » Avec un côté tragique, on l'a perçu, ce texte parle de vigilance nécessaire, face à un jour espéré, jour espéré où pourtant l'espérance cesse ; elle prend fin, en parallèle avec la célébration annoncée des noces de l'époux céleste, le mariage spirituel qui marque la fin de l'exil.
Lecture spirituelle du thème de l'exil. De l'exil d'Israël depuis Jérusalem jusqu'à Babylone — où le sens littéral renvoie, au-delà de lui-même, aux réalités célestes. En raccourci, dans cette perspective, à travers le retour à Jérusalem depuis Babylone, nous sommes appelés à revenir à Dieu depuis l'exil dans la chair où nous sommes. De façon symbolique, la Bible parle de ce qui est donc exil spirituel, en termes de Jérusalem, pour la vie avec Dieu, et de Babylone pour l'exil dans le péché et la culpabilité, la douleur.
On l'a déjà perçu — avec cette huile des lampes qui dans la vigilance, représente l'Esprit, — lecture du Nouveau Testament et même, d'ailleurs, des rabbins et au-delà, des prophètes.
Le thème de l'exil en général est récurrent dans la Bible depuis l'exode d’Égypte jusqu'au retour de l'exil babylonien. Et il acquiert très tôt une portée symbolique. Cela dès les temps des Prophètes. C’est de l’exil babylonien qu’il est question, et de ce qu’il signifie, et de l’espérance de sa fin. L’exil a-t-il cessé au temps de Jésus — quand Jean le Baptiste annonce encore sa fin !?
Cette lecture de l’exil dévoile finalement dans toute son intensité le drame réel de l'exil dont la dimension géographique s'avère alors être une expression d'une réalité tout intérieure. La nuit.
La nuit s'est épaissie. L'espérance de la lumière a-t-elle alors disparu ? Et si le cri du milieu de la nuit de veille des dix vierges avait retenti comme cri du dernier martyr, dernière vierge sage, au temps des prophètes où l’esprit soufflait par exemple ? Ou de l’an 70 — autre exemple : où l’on attendait une délivrance et un Royaume, délivrance qui s’est résolue, à l’inverse, par la catastrophe de la destruction du Temple de Jérusalem. On pourrait penser aussi à d’autres dates, d’autres cas, des martyres, advenus plus tard au cœur de catastrophes, de destructions.
Parole terrible que ce : « Je ne vous connais » sur laquelle on s’arrêtera donc.
Si ce cri : « voici l'époux sortez à sa rencontre », n'avait retenti joyeusement, comme cri de délivrance des mains de ses bourreaux, qu'aux oreilles d’un dernier martyr, en 70, d’une dernière vierge sage, alors que sa vie s’échappait des flammes, ou des coups de l’épée, nous laissant à notre désespoir et à notre manque définitif de cette huile, avec nos volontés dérisoires d’en acheter, l’huile et sa flamme, l’Esprit, que venait d’exhaler vers la Jérusalem qui l’accueillait, cette dernière vierge sage et refermait définitivement ses portes sur notre enfer récurrent et infini ?
Si les signes de l’histoire ultérieure de nos malheurs, ne faisant qu’amplifier toujours plus la chaîne indéfinie des malheurs d’antan, n’étaient là que pour confirmer que ce dernier cri annonçant l’époux, annonçant les noces spirituelles réjouissant ce dernier témoin — avait bien retenti, avant nous, depuis 70, pour un silence sans écho jusqu’aux génocides du XXe siècle ?
Si ce dernier avait retenti pour la dernière fois aux oreilles d’un dernier martyr avec la lassitude définitive de Dieu ?
« Je ne vous connais pas », seule parole tragique qui lui succède alors. Seul écho infini dans un désespoir infini…
Il reste à espérer que ce cri définitif n’ait pas déjà retenti, et qu’alors l’autre parole : « veillez donc, puisque vous ne savez ni le jour ni l’heure » nous concerne encore.
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L’huile des sages n’est rien d’autre que cette sagesse qui seule rend pleinement disponible à l’époux, qui peut venir d’un moment à l’autre. Les folles simplement, manquent d’huile ; elles ne savent pas être disponibles à l’époux. Et nous, savons-nous être disponibles ? Le temps est si bref.
Sommes-nous disponibles à quoi que nous demande l’époux en attendant, à son service, c’est-à-dire au service de notre prochain pour rendre ce monde plus beau ? Il nous faut alors recevoir l’huile de l’Esprit, ou toutes les joies de la vie comme dons de Dieu en un monde qu’il faudra quitter. Et nul ne sait ni le jour ni l’heure.
Mais dans cette certitude d’un manque que rien ne saurait combler, perce alors le regard de Dieu. Avec cette parole : « Voici l’époux, sortez à sa rencontre » (Mt 25 :6).
R.P., Poitiers, 09.11.14
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