Ésaïe 40, 1-11 ; Psaume 104 ; Tite 2, 11-14 & 3, 4-7 ; Luc 3, 15-22
Luc 3, 15-22
« Jésus, baptisé lui aussi » (v. 21). C'est le temps de la venue de cette bonne nouvelle que Jean annonçait et accompagnait d'exhortations, comme nous dit le texte (v.18).
Au-delà des rappels de la Loi en vue du repentir que portait Jean, il y a la consolation du peuple exilé dans le péché, qu'il annonce selon Ésaïe, et la miséricorde de Dieu, dont l'éminent signe public est ce baptême du Christ.
Miséricorde étonnante qui est dans le partage, dans la solidarité qui se dit dans ce baptême. Car quel besoin de repentir, de baptême de repentir, pour un homme sans péché ? C'est là un geste de solidarisation avec le peuple exilé dans le péché. Le Seigneur partage l'exil du peuple, vient dans l'exil avec le peuple afin de l'en ramener — baptisé lui aussi « comme tout le peuple était baptisé » (v. 21).
Être Fils de Dieu, ainsi que le dit de Jésus la voix venue du ciel avec l'Esprit saint apparu comme une colombe, est pleinement lié à la réalisation du bon plaisir de Dieu par ce baptême de solidarité. Être Fils de Dieu, réalité intemporelle, s'exprime dans le temps : dans son humanité, Jésus est le Fils éternel de Dieu, et il le signifie dans son baptême. Dans ce geste, se faire baptiser, qui le solidarise avec le peuple, Jésus reçoit de l'Esprit, publiquement, sa consécration pour entrer dans son ministère de Messie, de Sauveur du peuple, ce qui marque le temps de la fin de l'exil du peuple dans le péché. Par ce geste, il exprime sa prise en charge, en obéissance au Père, de son rôle de serviteur, celui qui se solidarise avec le peuple exilé, toujours selon Ésaïe.
C'est l'œuvre de la seule grâce de Dieu, qui vient nous rejoindre dans les lieux de nos égarements pour nous placer devant lui, dans la liberté de l'Esprit, fin de tous les exils, liberté fondée sur la confiance en sa faveur, sa grâce.
Lorsque avec l'Esprit venu comme une colombe, la voix déclare ainsi Jésus Fils de Dieu, c'est, en vertu de la solidarité qu'il montre à notre égard en se faisant baptiser, notre adoption comme fils et fille à notre tour qui est aussi prononcée. Le baptême, qui est en premier lieu un geste d'humilité, un geste de repentir, devient aussi le signe d'une régénération. Ici, il nous est dit aussi : « toi qui est pécheur comme le dit en premier lieu ton baptême, tu reçois aussi la force de l'Esprit de Jésus par lequel en se solidarisant avec les pécheurs, il a sanctifié, rempli d'Esprit, ce geste d'humilité. »
Dieu a dit une fois pour toutes en Jésus : « tu es mon fils, moi, aujourd'hui, je t'ai engendré. » Et cela signifie aussi ce partage de l'Esprit du Christ, ce don de son Esprit, dont le baptême est désormais un signe. Ce don d'affermissement, de force, est ce qui nous qualifie, nous donne capacité de grandir dans la liberté.
Qu'est-ce à dire ? On connaît le reste de la prédication de Jean, celui qui baptise Jésus, les fameuses exhortations avec lesquelles il accompagne la Bonne Nouvelle : comblez les abîmes, abaissez les montagnes, redressez ce qui est tordu. Notre texte nous rappelle qu'il est emprisonné pour cela, par le roi Hérode, qui n'aime pas qu'on lui rappelle trop publiquement qu'il est un pécheur public.
Cet appel de Jean à la justice, Jésus vient de l'assumer par son baptême, l'assumer pour l'accomplir par solidarité. Car la solidarité n'est pas un vain mot. Il s'agit d'être concrets. Jésus l'est. Et ce que le Baptiste nous appelle tous à faire, Jésus le fait. L'Esprit l'investit pour cela, et puisqu'il nous donne aussi cet Esprit, il nous donne aussi, comme le dit notre liturgie, la force de la faire. C'est là la liberté.
Le temps annoncé par Jean le Baptiste s’est approché ; le temps de combler les fossés creusés par la richesse et la corruption. Un temps toujours actuel bien sûr, tant que dure le temps — « vous aurez toujours les pauvres avec vous », rappellera Jésus. Face à l'énormité du déséquilibre, on est pris d'un sentiment de malaise, et d'impuissance. Et dès lors, à terme, de culpabilité. Ce qui est inutile, comme toute impuissance ou culpabilité, mais le Christ libère de la culpabilité en donnant du même coup la force qui est dans la liberté qu'il octroie.
Car être libéré de la culpabilité suppose recevoir aussi la parole qui fait se lever, et la force de se lever. Lazare n'est libéré de son tombeau que parce qu'il entend et reçoit la Parole qui lui dit : sors. Et il ne sort que par la force de cette Parole, par l'Esprit qui l'accompagne et la porte. La liberté que nous donne le Christ se traduit, comme toute liberté, en don. Qui ne sait que se replier, et ne sait pas donner, n'est pas libre. Un Lazare qui entendant la parole qui lui dit « Sors », et qui ne sortirait pas donnerait à se demander s'il l'a bien entendue. Paul parle (Ro 12, 3) de la mesure de foi accordée à chacun, et qui se jauge en liberté, et donc en don.
Si l'Esprit nous est donné, si tout est don, qu'en est-il d'une liberté qui ne débouche pas sur le don mais laisse dans le repliement et la peur ? Le don de temps, de présence, d'attention, et de ce qui est proche du cœur, d'argent.
Rappelons-nous aujourd'hui encore que, avec ses faibles moyens, mais avec l’affermissement de l’Esprit, l'Église a aussi pour vocation de lutter contre les déséquilibres dénoncés par Jean, et qui n'ont peut-être fait qu'augmenter ; puisqu’on continue d’assister à l'augmentation apparente du déséquilibre que dénonçait Jean.
Le Christ est apparu au baptême de Jean pour se solidariser avec nous et nous donner la force, pour nous rendre libres. « Vous connaîtrez la vérité et la vérité vous rendra libre », vous qui vous dites enfants d'Abraham, dira Jésus — Abraham à qui Dieu suscite des enfants depuis des pierres, selon ce même Jean le Baptiste. Puisque l'Évangile n'est rien d'autre que la parole qui libère.
Ma Parole, dit Dieu, ne revient pas à moi sans effet. Elle demeure éternellement. Et le souffle de l'Esprit qui la porte libère ce qui est appelé à la liberté et dessèche ce qui n’a pas lieu d’être : « il vous baptisera dans l'Esprit Saint et le feu »… « recueillant le blé dans son grenier ; mais la bale, il la brûlera ». Tout comme « l'herbe sèche, la fleur se fane quand le souffle du Seigneur vient sur elles... Oui, le peuple, c'est de l'herbe : l'herbe sèche, la fleur se fane, mais la parole de notre Dieu subsistera toujours ! »
Alors que l'Esprit saint nous libère de ce qui doit être desséché et nous fasse entendre cette Parole par laquelle Jésus nous est donné : « Tu es mon fils, moi, aujourd'hui, je t'ai engendré. »
Alors la liberté jaillira comme un fleuve qui donne sans cesse l'eau qu'il reçoit, comme ce fleuve au-dessus duquel la colombe désignait l'Esprit par lequel nous aussi pouvons devenir fils et filles, c'est-à-dire libres.
Luc 3, 15-22
15 Le peuple était dans l’attente et tous se posaient en eux-mêmes des questions au sujet de Jean : ne serait-il pas le Messie ?
16 Jean répondit à tous : “Moi, c’est d’eau que je vous baptise; mais il vient, celui qui est plus fort que moi, et je ne suis pas digne de délier la lanière de ses sandales. Lui, il vous baptisera dans l’Esprit Saint et le feu;
17 il a sa pelle à vanner à la main pour nettoyer son aire et pour recueillir le blé dans son grenier ; mais la bale, il la brûlera au feu qui ne s’éteint pas.”
18 Ainsi, avec bien d’autres exhortations encore, il annonçait au peuple la Bonne Nouvelle.
19 Mais Hérode le tétrarque, qu’il blâmait au sujet d’Hérodiade, la femme de son frère, et de tous les forfaits qu’il avait commis,
20 ajouta encore ceci à tout le reste : il enferma Jean en prison.
21 Or comme tout le peuple était baptisé, Jésus, baptisé lui aussi, priait; alors le ciel s’ouvrit ;
22 l’Esprit Saint descendit sur Jésus sous une apparence corporelle, comme une colombe, et une voix vint du ciel : “Tu es mon fils, moi, aujourd’hui, je t’ai engendré.”
*
« Jésus, baptisé lui aussi » (v. 21). C'est le temps de la venue de cette bonne nouvelle que Jean annonçait et accompagnait d'exhortations, comme nous dit le texte (v.18).
Au-delà des rappels de la Loi en vue du repentir que portait Jean, il y a la consolation du peuple exilé dans le péché, qu'il annonce selon Ésaïe, et la miséricorde de Dieu, dont l'éminent signe public est ce baptême du Christ.
Miséricorde étonnante qui est dans le partage, dans la solidarité qui se dit dans ce baptême. Car quel besoin de repentir, de baptême de repentir, pour un homme sans péché ? C'est là un geste de solidarisation avec le peuple exilé dans le péché. Le Seigneur partage l'exil du peuple, vient dans l'exil avec le peuple afin de l'en ramener — baptisé lui aussi « comme tout le peuple était baptisé » (v. 21).
Être Fils de Dieu, ainsi que le dit de Jésus la voix venue du ciel avec l'Esprit saint apparu comme une colombe, est pleinement lié à la réalisation du bon plaisir de Dieu par ce baptême de solidarité. Être Fils de Dieu, réalité intemporelle, s'exprime dans le temps : dans son humanité, Jésus est le Fils éternel de Dieu, et il le signifie dans son baptême. Dans ce geste, se faire baptiser, qui le solidarise avec le peuple, Jésus reçoit de l'Esprit, publiquement, sa consécration pour entrer dans son ministère de Messie, de Sauveur du peuple, ce qui marque le temps de la fin de l'exil du peuple dans le péché. Par ce geste, il exprime sa prise en charge, en obéissance au Père, de son rôle de serviteur, celui qui se solidarise avec le peuple exilé, toujours selon Ésaïe.
C'est l'œuvre de la seule grâce de Dieu, qui vient nous rejoindre dans les lieux de nos égarements pour nous placer devant lui, dans la liberté de l'Esprit, fin de tous les exils, liberté fondée sur la confiance en sa faveur, sa grâce.
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Lorsque avec l'Esprit venu comme une colombe, la voix déclare ainsi Jésus Fils de Dieu, c'est, en vertu de la solidarité qu'il montre à notre égard en se faisant baptiser, notre adoption comme fils et fille à notre tour qui est aussi prononcée. Le baptême, qui est en premier lieu un geste d'humilité, un geste de repentir, devient aussi le signe d'une régénération. Ici, il nous est dit aussi : « toi qui est pécheur comme le dit en premier lieu ton baptême, tu reçois aussi la force de l'Esprit de Jésus par lequel en se solidarisant avec les pécheurs, il a sanctifié, rempli d'Esprit, ce geste d'humilité. »
Dieu a dit une fois pour toutes en Jésus : « tu es mon fils, moi, aujourd'hui, je t'ai engendré. » Et cela signifie aussi ce partage de l'Esprit du Christ, ce don de son Esprit, dont le baptême est désormais un signe. Ce don d'affermissement, de force, est ce qui nous qualifie, nous donne capacité de grandir dans la liberté.
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Qu'est-ce à dire ? On connaît le reste de la prédication de Jean, celui qui baptise Jésus, les fameuses exhortations avec lesquelles il accompagne la Bonne Nouvelle : comblez les abîmes, abaissez les montagnes, redressez ce qui est tordu. Notre texte nous rappelle qu'il est emprisonné pour cela, par le roi Hérode, qui n'aime pas qu'on lui rappelle trop publiquement qu'il est un pécheur public.
Cet appel de Jean à la justice, Jésus vient de l'assumer par son baptême, l'assumer pour l'accomplir par solidarité. Car la solidarité n'est pas un vain mot. Il s'agit d'être concrets. Jésus l'est. Et ce que le Baptiste nous appelle tous à faire, Jésus le fait. L'Esprit l'investit pour cela, et puisqu'il nous donne aussi cet Esprit, il nous donne aussi, comme le dit notre liturgie, la force de la faire. C'est là la liberté.
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Le temps annoncé par Jean le Baptiste s’est approché ; le temps de combler les fossés creusés par la richesse et la corruption. Un temps toujours actuel bien sûr, tant que dure le temps — « vous aurez toujours les pauvres avec vous », rappellera Jésus. Face à l'énormité du déséquilibre, on est pris d'un sentiment de malaise, et d'impuissance. Et dès lors, à terme, de culpabilité. Ce qui est inutile, comme toute impuissance ou culpabilité, mais le Christ libère de la culpabilité en donnant du même coup la force qui est dans la liberté qu'il octroie.
Car être libéré de la culpabilité suppose recevoir aussi la parole qui fait se lever, et la force de se lever. Lazare n'est libéré de son tombeau que parce qu'il entend et reçoit la Parole qui lui dit : sors. Et il ne sort que par la force de cette Parole, par l'Esprit qui l'accompagne et la porte. La liberté que nous donne le Christ se traduit, comme toute liberté, en don. Qui ne sait que se replier, et ne sait pas donner, n'est pas libre. Un Lazare qui entendant la parole qui lui dit « Sors », et qui ne sortirait pas donnerait à se demander s'il l'a bien entendue. Paul parle (Ro 12, 3) de la mesure de foi accordée à chacun, et qui se jauge en liberté, et donc en don.
Si l'Esprit nous est donné, si tout est don, qu'en est-il d'une liberté qui ne débouche pas sur le don mais laisse dans le repliement et la peur ? Le don de temps, de présence, d'attention, et de ce qui est proche du cœur, d'argent.
Rappelons-nous aujourd'hui encore que, avec ses faibles moyens, mais avec l’affermissement de l’Esprit, l'Église a aussi pour vocation de lutter contre les déséquilibres dénoncés par Jean, et qui n'ont peut-être fait qu'augmenter ; puisqu’on continue d’assister à l'augmentation apparente du déséquilibre que dénonçait Jean.
Le Christ est apparu au baptême de Jean pour se solidariser avec nous et nous donner la force, pour nous rendre libres. « Vous connaîtrez la vérité et la vérité vous rendra libre », vous qui vous dites enfants d'Abraham, dira Jésus — Abraham à qui Dieu suscite des enfants depuis des pierres, selon ce même Jean le Baptiste. Puisque l'Évangile n'est rien d'autre que la parole qui libère.
Ma Parole, dit Dieu, ne revient pas à moi sans effet. Elle demeure éternellement. Et le souffle de l'Esprit qui la porte libère ce qui est appelé à la liberté et dessèche ce qui n’a pas lieu d’être : « il vous baptisera dans l'Esprit Saint et le feu »… « recueillant le blé dans son grenier ; mais la bale, il la brûlera ». Tout comme « l'herbe sèche, la fleur se fane quand le souffle du Seigneur vient sur elles... Oui, le peuple, c'est de l'herbe : l'herbe sèche, la fleur se fane, mais la parole de notre Dieu subsistera toujours ! »
Alors que l'Esprit saint nous libère de ce qui doit être desséché et nous fasse entendre cette Parole par laquelle Jésus nous est donné : « Tu es mon fils, moi, aujourd'hui, je t'ai engendré. »
Alors la liberté jaillira comme un fleuve qui donne sans cesse l'eau qu'il reçoit, comme ce fleuve au-dessus duquel la colombe désignait l'Esprit par lequel nous aussi pouvons devenir fils et filles, c'est-à-dire libres.
RP, Poitiers, 10.01.16
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