Proverbes 8, 12-20 & 32-36 ; Psaume 63 ; 1 Thessaloniciens, 4, 13-18 ; Matthieu 25, 1-13
Matthieu 25, 1-13
Voilà un texte disant que nous ne savons ni le jour ni l’heure où le Christ venant en gloire est présenté en futur époux — de sa Dame-Église, Dame-Appelée, future épousée céleste (cf. 2 Jean, v. 1). Et voilà dix jeunes filles, demoiselles d’honneur de la Dame-Église, séduites par cet époux divin, emportées par la séduction de son Esprit, signifié par l'huile des lampes. Séduites, les sages les comme folles. Mais voici le sommeil…
« Veillez donc, puisque vous ne savez ni le jour, ni l’heure. » Mais, nous ne savons ni le jour ni l'heure par rapport à quoi concrètement, hormis la délivrance lors de la rencontre de l'époux céleste ? Eh bien le contexte l'indique clairement : ici, la menace de la persécution, et donc la précarité des disciples, et la nôtre. Jésus a parlé aussi des soucis de ce monde, ou des joies illusoires (persécutions, joie, soucis — c'est la parabole du semeur, Mt 13), bref c'est tout ce qui nous fait perdre de vue la nécessité de veiller dans l'attente la délivrance. Ce qui précède immédiatement ce texte n’en laisse aucun doute :
Mt 24, 9-10 : « Alors on vous livrera aux tourments, et l’on vous fera mourir ; et vous serez haïs de toutes les nations, à cause de mon nom. Alors aussi plusieurs succomberont, et ils se trahiront, se haïront les uns les autres. »
Mt 24 : 37-39 : « Ce qui arriva du temps de Noé arrivera de même à l’avènement du Fils de l’homme. Car, dans les jours qui précédèrent le déluge, les hommes mangeaient et buvaient, se mariaient et mariaient leurs enfants, jusqu’au jour où Noé entra dans l’arche ; et ils ne se doutèrent de rien, jusqu’à ce que le déluge vînt et les emportât tous »…
Mt 24, 45-50 : « Quel est donc le serviteur fidèle et prudent, que son maître a établi sur ses gens, pour leur donner la nourriture au temps convenable ? Heureux ce serviteur, que son maître, à son arrivée, trouvera faisant ainsi ! Je vous le dis en vérité, il l’établira sur tous ses biens. Mais, si c’est un méchant serviteur, qui dise en lui-même : Mon maître tarde à venir, s’il se met à battre ses compagnons, s’il mange et boit avec les ivrognes, le maître de ce serviteur viendra le jour où il ne s’y attend pas et à l’heure qu’il ne connaît pas »…
Persécution, fêtes, soucis. « Alors le royaume des cieux sera semblable à dix vierges »… Notre texte de ce jour…
La menace de la persécution, ce qu’elle a d’inéluctable — « vous serez haïs de toutes les nations, à cause de mon nom » — est on ne peut plus claire. Signe la précarité de la vie de ce temps, avec ses fêtes et ses soucis. Fragilité. Et on ne peut plus clair le fait que cela surprend toujours ses victimes — comme au fond toute menace sur la fragilité de nos vies, persécution, maladie, guerres, etc. Une imminence telle qu’elle déconcerte toujours. « Ayez de l’huile en réserve » — « veillez donc », a dit Jésus à ses disciples. C’est toujours inattendu, d’autant que les victimes savent n’avoir rien fait pour mériter ça ! La menace rappelle à ses victimes ce qui vaut pour nous tous : la figure de ce monde passe. Et on l'oublie. L'huile de la vigilance diminue…
La fermeture de la porte de la salle de noces ressemble alors à celle de la porte de l’arche de Noé… tandis que dehors, ailleurs dans le monde, fait rage aux jours où parle Jésus la violence de la persécution ; ou en d’autres temps, ou en même temps ! la douceur d'un monde tiède ou les soucis du temps… tandis que le niveau d'huile diminue. Non que les demoiselles (car il s’agit bien sûr de demoiselles d’honneur et pas de polygamie : dans la polygamie, on n'a jamais épousé dix femmes en même temps ! Tout au plus successivement, et très rarement avec un tel nombre !) — non que que les demoiselles sages et avisées soient épargnées de la persécution, maladie, guerre, ni de tout ce qui fait perdre de vue que ce monde passe, mais elles savent le secret des fioles d'huile…
Persécution, soucis du monde, tiédeur… Ça ne concerne pas que le temps de Jésus !
Persécution, comme signe de ce que « vous n'êtes pas de ce monde ». De nos jours, de l’Afrique à l’Asie et au Proche-Orient, où les chrétiens araméens parlent encore la langue dans laquelle Jésus donnait cette histoire de demoiselles d’honneur. Ils ont subsisté, en Irak et en Syrie, souvent persécutés, depuis les origines chrétiennes, vierge sage veillant dans la nuit…
Les persécutions n’ont jamais cessé, comme n'ont jamais cessé les soucis de ce monde et la tiédeur du temps. C'est le vrai secret, caché derrière tous les motifs que l'on veut… et qui permet aux demoiselles dotées d'huile de persévérer. C'est le secret des fioles d'huile. Jésus est exclu de ce monde parce qu'il dérange les rouages trop bien huilés de ce monde, violent contre les uns, tiède et assoupissant contre les autres…
Au-delà des prétextes idéologiques, religieux ou dogmatiques, de la persécution, allant du motif ancien de la religion illégale, à celui de l’hérésie, au matérialisme dialectique soviétique et à l’interdiction actuelle d’ériger une église dans tel pays de la péninsule arabique — motifs qu’il ne faut pas négliger —, reste que l’instabilité d’un pays a toujours pour conséquence la prise à partie de ses minorités, de celles et ceux qui pensent ou croient différemment (juifs, yézidis aujourd’hui, hérétiques antan, chrétiens…). À l'instar de Jésus, le rejeté innocent, totalement innocent, bouc émissaire et agneau du sacrifice.
Et au-delà du confort douceâtre dans lequel baignent d'autres, dans les pays tranquilles, et dans l'ignorance des soucis de ce monde qui accablent leurs tout proches dans ces mêmes pays… Pour tous, les persécutés, les inquiets, les joyeux, Jésus dit le secret des fioles d'huiles des demoiselles d’honneur qui veillent dans la nuit…
Huile symbole de la sagesse qui fait défaut à cinq d’entre elles, huile symbole de l’Esprit prophétique qui semble manquer cruellement au temps où il serait le plus utile. Au temps où pullulent les faux prophètes qui clament « paix, paix, et il n’y a point de paix » (Jérémie 8, 11)… tandis que les prophètes de malheur — Jérémie et les autres, jusqu'à Jésus — se voient montrer du doigt, dans l'ignorance des vierges folles.
Elles nous ressemblent, cherchant à combler ce vide que nous connaissons tous et que « seul Dieu peut combler ». Car la sagesse de Dieu dévoile en nous tous ce vide, ce manque de Dieu : qui la sagesse appelle-t-elle d'autre en effet que ceux qui en manquent ?
Nous en manquons pour ne pas savoir que toutes les séductions passagères (passager que dit cruellement la persécution) ne sont qu'autant de signes de ce manque. Au fond, que trouvons-nous d’autre que cet enseignement dans la Bible ?
En une nuit de veille, nos dix demoiselles s'assoupissent. Un assoupissement qui atteint tous les vivants, désignant notre passage en ce monde. Le sommeil cessera d'un moment à l'autre.
L’huile des sages n’est alors rien d’autre que cette sagesse de la foi qui seule rend pleinement disponible à l’époux, qui peut venir d’un moment à l’autre. Les folles simplement, n’ont pas su être disponibles à l’époux. Et nous, savons-nous être disponibles ? Le temps est si bref.
Sommes-nous disponibles à quoi que nous demande l’époux de la Dame céleste que nous sommes de façon cachée, sommes-nous disponibles à quoi qu’il nous demande en attendant, à son service, c’est-à-dire au service de notre prochain pour rendre ce monde qui passe plus beau, moins violent là, moins vain ici ? Il nous faut alors recevoir l’huile de l’Esprit, ou toutes les joies de la vie comme dons de Dieu en un monde qu’il faudra quitter. Et nul ne sait ni le jour ni l’heure.
Mais dans cette certitude d’un manque que rien ne saurait combler, perce alors le regard de Dieu. Avec cette parole : « Voici l’époux, sortez à sa rencontre » (Mt 25, 6).
Matthieu 25, 1-13
1 Alors il en sera du Royaume des cieux comme de dix jeunes filles qui prirent leurs lampes et sortirent à la rencontre de l’époux.
2 Cinq d’entre elles étaient insensées et cinq étaient avisées.
3 En prenant leurs lampes, les filles insensées n’avaient pas emporté d’huile ;
4 les filles avisées, elles, avaient pris, avec leurs lampes, de l’huile dans des fioles.
5 Comme l’époux tardait, elles s’assoupirent toutes et s’endormirent.
6 Au milieu de la nuit, un cri retentit : “Voici l’époux ! Sortez à sa rencontre.”
7 Alors toutes ces jeunes filles se réveillèrent et apprêtèrent leurs lampes.
8 Les insensées dirent aux avisées : “Donnez-nous de votre huile, car nos lampes s’éteignent.”
9 Les avisées répondirent : “Certes pas, il n’y en aurait pas assez pour nous et pour vous ! Allez plutôt chez les marchands et achetez-en pour vous.”
10 Pendant qu’elles allaient en acheter, l’époux arriva ; celles qui étaient prêtes entrèrent avec lui dans la salle des noces, et l’on ferma la porte.
11 Finalement, arrivent à leur tour les autres jeunes filles, qui disent : “Seigneur, seigneur, ouvre-nous !”
12 Mais il répondit : “En vérité, je vous le déclare, je ne vous connais pas.”
13 Veillez donc, car vous ne savez ni le jour ni l’heure.
*
Voilà un texte disant que nous ne savons ni le jour ni l’heure où le Christ venant en gloire est présenté en futur époux — de sa Dame-Église, Dame-Appelée, future épousée céleste (cf. 2 Jean, v. 1). Et voilà dix jeunes filles, demoiselles d’honneur de la Dame-Église, séduites par cet époux divin, emportées par la séduction de son Esprit, signifié par l'huile des lampes. Séduites, les sages les comme folles. Mais voici le sommeil…
« Veillez donc, puisque vous ne savez ni le jour, ni l’heure. » Mais, nous ne savons ni le jour ni l'heure par rapport à quoi concrètement, hormis la délivrance lors de la rencontre de l'époux céleste ? Eh bien le contexte l'indique clairement : ici, la menace de la persécution, et donc la précarité des disciples, et la nôtre. Jésus a parlé aussi des soucis de ce monde, ou des joies illusoires (persécutions, joie, soucis — c'est la parabole du semeur, Mt 13), bref c'est tout ce qui nous fait perdre de vue la nécessité de veiller dans l'attente la délivrance. Ce qui précède immédiatement ce texte n’en laisse aucun doute :
Mt 24, 9-10 : « Alors on vous livrera aux tourments, et l’on vous fera mourir ; et vous serez haïs de toutes les nations, à cause de mon nom. Alors aussi plusieurs succomberont, et ils se trahiront, se haïront les uns les autres. »
Mt 24 : 37-39 : « Ce qui arriva du temps de Noé arrivera de même à l’avènement du Fils de l’homme. Car, dans les jours qui précédèrent le déluge, les hommes mangeaient et buvaient, se mariaient et mariaient leurs enfants, jusqu’au jour où Noé entra dans l’arche ; et ils ne se doutèrent de rien, jusqu’à ce que le déluge vînt et les emportât tous »…
Mt 24, 45-50 : « Quel est donc le serviteur fidèle et prudent, que son maître a établi sur ses gens, pour leur donner la nourriture au temps convenable ? Heureux ce serviteur, que son maître, à son arrivée, trouvera faisant ainsi ! Je vous le dis en vérité, il l’établira sur tous ses biens. Mais, si c’est un méchant serviteur, qui dise en lui-même : Mon maître tarde à venir, s’il se met à battre ses compagnons, s’il mange et boit avec les ivrognes, le maître de ce serviteur viendra le jour où il ne s’y attend pas et à l’heure qu’il ne connaît pas »…
Persécution, fêtes, soucis. « Alors le royaume des cieux sera semblable à dix vierges »… Notre texte de ce jour…
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La menace de la persécution, ce qu’elle a d’inéluctable — « vous serez haïs de toutes les nations, à cause de mon nom » — est on ne peut plus claire. Signe la précarité de la vie de ce temps, avec ses fêtes et ses soucis. Fragilité. Et on ne peut plus clair le fait que cela surprend toujours ses victimes — comme au fond toute menace sur la fragilité de nos vies, persécution, maladie, guerres, etc. Une imminence telle qu’elle déconcerte toujours. « Ayez de l’huile en réserve » — « veillez donc », a dit Jésus à ses disciples. C’est toujours inattendu, d’autant que les victimes savent n’avoir rien fait pour mériter ça ! La menace rappelle à ses victimes ce qui vaut pour nous tous : la figure de ce monde passe. Et on l'oublie. L'huile de la vigilance diminue…
La fermeture de la porte de la salle de noces ressemble alors à celle de la porte de l’arche de Noé… tandis que dehors, ailleurs dans le monde, fait rage aux jours où parle Jésus la violence de la persécution ; ou en d’autres temps, ou en même temps ! la douceur d'un monde tiède ou les soucis du temps… tandis que le niveau d'huile diminue. Non que les demoiselles (car il s’agit bien sûr de demoiselles d’honneur et pas de polygamie : dans la polygamie, on n'a jamais épousé dix femmes en même temps ! Tout au plus successivement, et très rarement avec un tel nombre !) — non que que les demoiselles sages et avisées soient épargnées de la persécution, maladie, guerre, ni de tout ce qui fait perdre de vue que ce monde passe, mais elles savent le secret des fioles d'huile…
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Persécution, soucis du monde, tiédeur… Ça ne concerne pas que le temps de Jésus !
Persécution, comme signe de ce que « vous n'êtes pas de ce monde ». De nos jours, de l’Afrique à l’Asie et au Proche-Orient, où les chrétiens araméens parlent encore la langue dans laquelle Jésus donnait cette histoire de demoiselles d’honneur. Ils ont subsisté, en Irak et en Syrie, souvent persécutés, depuis les origines chrétiennes, vierge sage veillant dans la nuit…
Les persécutions n’ont jamais cessé, comme n'ont jamais cessé les soucis de ce monde et la tiédeur du temps. C'est le vrai secret, caché derrière tous les motifs que l'on veut… et qui permet aux demoiselles dotées d'huile de persévérer. C'est le secret des fioles d'huile. Jésus est exclu de ce monde parce qu'il dérange les rouages trop bien huilés de ce monde, violent contre les uns, tiède et assoupissant contre les autres…
Au-delà des prétextes idéologiques, religieux ou dogmatiques, de la persécution, allant du motif ancien de la religion illégale, à celui de l’hérésie, au matérialisme dialectique soviétique et à l’interdiction actuelle d’ériger une église dans tel pays de la péninsule arabique — motifs qu’il ne faut pas négliger —, reste que l’instabilité d’un pays a toujours pour conséquence la prise à partie de ses minorités, de celles et ceux qui pensent ou croient différemment (juifs, yézidis aujourd’hui, hérétiques antan, chrétiens…). À l'instar de Jésus, le rejeté innocent, totalement innocent, bouc émissaire et agneau du sacrifice.
Et au-delà du confort douceâtre dans lequel baignent d'autres, dans les pays tranquilles, et dans l'ignorance des soucis de ce monde qui accablent leurs tout proches dans ces mêmes pays… Pour tous, les persécutés, les inquiets, les joyeux, Jésus dit le secret des fioles d'huiles des demoiselles d’honneur qui veillent dans la nuit…
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Huile symbole de la sagesse qui fait défaut à cinq d’entre elles, huile symbole de l’Esprit prophétique qui semble manquer cruellement au temps où il serait le plus utile. Au temps où pullulent les faux prophètes qui clament « paix, paix, et il n’y a point de paix » (Jérémie 8, 11)… tandis que les prophètes de malheur — Jérémie et les autres, jusqu'à Jésus — se voient montrer du doigt, dans l'ignorance des vierges folles.
Elles nous ressemblent, cherchant à combler ce vide que nous connaissons tous et que « seul Dieu peut combler ». Car la sagesse de Dieu dévoile en nous tous ce vide, ce manque de Dieu : qui la sagesse appelle-t-elle d'autre en effet que ceux qui en manquent ?
Nous en manquons pour ne pas savoir que toutes les séductions passagères (passager que dit cruellement la persécution) ne sont qu'autant de signes de ce manque. Au fond, que trouvons-nous d’autre que cet enseignement dans la Bible ?
En une nuit de veille, nos dix demoiselles s'assoupissent. Un assoupissement qui atteint tous les vivants, désignant notre passage en ce monde. Le sommeil cessera d'un moment à l'autre.
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L’huile des sages n’est alors rien d’autre que cette sagesse de la foi qui seule rend pleinement disponible à l’époux, qui peut venir d’un moment à l’autre. Les folles simplement, n’ont pas su être disponibles à l’époux. Et nous, savons-nous être disponibles ? Le temps est si bref.
Sommes-nous disponibles à quoi que nous demande l’époux de la Dame céleste que nous sommes de façon cachée, sommes-nous disponibles à quoi qu’il nous demande en attendant, à son service, c’est-à-dire au service de notre prochain pour rendre ce monde qui passe plus beau, moins violent là, moins vain ici ? Il nous faut alors recevoir l’huile de l’Esprit, ou toutes les joies de la vie comme dons de Dieu en un monde qu’il faudra quitter. Et nul ne sait ni le jour ni l’heure.
Mais dans cette certitude d’un manque que rien ne saurait combler, perce alors le regard de Dieu. Avec cette parole : « Voici l’époux, sortez à sa rencontre » (Mt 25, 6).
R.P., Poitiers, 12.11.17
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