dimanche 4 septembre 2011

Parole d’Alliance confirmée




Ézéchiel 33, 7-9 ; Psaume 95 ; Romains 13, 8-10 ; Matthieu 18, 15-20


Ézéchiel 33, 7-9
7 C’est donc toi, fils d’homme, que j’ai établi guetteur pour la maison d’Israël; tu écouteras la parole qui sort de ma bouche et tu les avertiras de ma part.
8 Si je dis au méchant: Méchant, tu mourras certainement, mais que toi, tu ne parles pas pour avertir le méchant de quitter sa conduite, lui, le méchant, mourra de son péché, mais c’est à toi que je demanderai compte de son sang.
9 Par contre, si tu avertis le méchant pour qu’il se détourne de sa conduite, et qu’il ne veuille pas s’en détourner, il mourra de son péché, et toi, tu sauveras ta vie.

Romains 13, 8-10
8  N’ayez aucune dette envers qui que ce soit, sinon celle de vous aimer les uns les autres; car celui qui aime son prochain a pleinement accompli la loi.
9 En effet, les commandements : Tu ne commettras pas d’adultère, tu ne tueras pas, tu ne voleras pas, tu ne convoiteras pas, ainsi que tous les autres, se résument dans cette parole: Tu aimeras ton prochain comme toi-même.
10  L’amour ne fait aucun tort au prochain; l’amour est donc le plein accomplissement de la loi.

Matthieu 18, 18-20
18 En vérité, je vous le déclare: tout ce que vous lierez sur la terre sera lié au ciel, et tout ce que vous délierez sur la terre sera délié au ciel.
19 "Je vous le déclare encore, si deux d’entre vous, sur la terre, se mettent d’accord pour demander quoi que ce soit, cela leur sera accordé par mon Père qui est aux cieux.
20 Car, là où deux ou trois se trouvent réunis en mon nom, je suis au milieu d’eux."

*

Dans la lecture de la Bible, dans l’enseignement du catéchisme, dans les cultes et les cérémonies communautaires s’offre une parole de liberté, qui retentit dans les textes de ce jour.

Est venu pour nos adolescents le jour où ils sont à leur tour en âge de vivre par eux-mêmes ce que nos parents, nos ancêtres dans la foi ont porté jusqu’à nous. Il me plaît de rappeler que c’est aujourd’hui le jour du Musée du désert, son centenaire — souvenir des témoins anciens de la vérité —, où sont présents aujourd’hui quelques membres de notre paroisse. Le rappel de la délivrance ouverte par Dieu est la parole du guetteur — « c’est toi [...] que j’ai établi guetteur pour la maison d’Israël ; tu écouteras la parole qui sort de ma bouche et tu les avertiras de ma part » (Ez 33, 7). Sommes-nous justes en ce moment, comme Eglise, comme nation ? Ézéchiel nous invite au moins à nous interroger : notre pays a effectué sur deux pays, Côte d’Ivoire, puis Libye, des bombardements tuant forcément des hommes, des femmes, des enfants : est-ce juste ? Et le silence des Eglises répondant à celui des médias, est-il juste ? « C’est toi que j’ai établi guetteur »…

C’était juste une question, que pose le texte d’Ézéchiel de ce jour, et qui est au cœur de la délivrance que commémore la fête centrale du judaïsme comme du christianisme, la Pâque, sortie d’Égypte, sortie du tombeau, qui nous rend un jour responsables. Jésus adolescent est lui aussi passé par ce tournant de sa vie. Ce que nous rappelle un texte connu de l’Évangile de Luc.

Luc 2, 41-49 :
41 Les parents de Jésus allaient chaque année à Jérusalem, à la fête de Pâque.
42 Lorsqu’il fut âgé de douze ans, ils y montèrent, selon la coutume de la fête.
43 Puis, quand les jours furent écoulés, et qu’ils s’en retournèrent, l’enfant Jésus resta à Jérusalem. Son père et sa mère ne s’en aperçurent pas.
44 Croyant qu’il était avec leurs compagnons de voyage, ils firent une journée de chemin, et le cherchèrent parmi leurs parents et leurs connaissances.
45 Mais, ne l’ayant pas trouvé, ils retournèrent à Jérusalem pour le chercher.
46 Au bout de trois jours, ils le trouvèrent dans le temple, assis au milieu des docteurs, les écoutant et les interrogeant.
47 Tous ceux qui l’entendaient étaient frappés de son intelligence et de ses réponses.
48 Quand ses parents le virent, ils furent saisis d’étonnement, et sa mère lui dit : Mon enfant, pourquoi as-tu agi de la sorte avec nous ? Voici, ton père et moi, nous te cherchions avec angoisse.
49 Il leur dit : Pourquoi me cherchiez-vous ? Ne saviez-vous pas qu’il faut que je m’occupe des affaires de mon Père ?

C’est donc le pèlerinage de la Pâque ; le pèlerinage le plus important du judaïsme. En rapport précis avec la mémoire fondatrice de notre présent — de notre aujourd’hui, et dès lors, de nos lendemains. Au-delà du souvenir familial, il y a la dimension communautaire, qui fait que l’on monte à Jérusalem, au Temple. Pour cela, s’il le faut, on marche longtemps sur les routes poussiéreuses — depuis la Galilée, pour Marie et Joseph. On part en groupe, on se découvre en route : c’est l’occasion de sceller des liens aussi. Ainsi, au retour de la fête, on a lié solidement connaissance. Comme une grande famille. Les enfants circulent d’un groupe à l’autre. Le voyage est long. On fait halte, on bivouaque tous ensemble.

Dans cette joyeuse cohue, Jésus, peuvent se dire ses parents, est quelque part avec ses copains, et comme eux, il est sous telle ou telle tente. Rien que de très normal. Puis on découvre qu’il n’est pas là du tout ! Pour que toutefois le lecteur ne se trompe pas sur ce qui se passe, Luc précisera que Jésus « était soumis » à ses parents (Luc 2, 51). Mais Jésus pourtant est mûr désormais, il a l’âge de la responsabilité devant Dieu, autour de laquelle l’histoire du judaïsme a forgé le rite de la bar-mitsva.

Dans la tradition biblique, dès les temps les plus anciens, les enfants au tournant par lequel ils deviennent jeunes adultes, sont déclarés responsables devant Dieu — responsables de ce qu’ils ont entendu jusque là. Responsabilité, c’est-à-dire capacité de répondre ; de répondre à, de répondre de — et notamment répondre de la parole reçue.

C’est là ce que le judaïsme appelle « bar-mitsva », ce qui signifie « enfant du commandement ». Dans notre enfance, nos parents sont responsables de notre relation avec Dieu. Puis nous accédons au temps où nous-mêmes devenons seuls responsables devant lui. C’est le passage à l’âge de la majorité religieuse.

Jésus aussi est passé par là. Ce jour-là, il se situe devant la parole de Dieu en présence des docteurs de la Loi étonnés. « Du ciel, il t’a fait entendre sa voix pour faire ton éducation » dit le Deutéronome (4, v3. 36). Jésus vient de dévoiler qu’il est au cœur de cette relation intime avec Dieu. Ses parents sont montés à Jérusalem pour la Pâque. Tout le début de l’Évangile de Luc les montre observant la Torah. Scènes ordinaires de la vie religieuse. Ici Jésus, atteignant l’âge de la responsabilité religieuse, va exprimer dans tout son sens ce qu’est devenir adulte devant Dieu, unique devant Dieu, par soi-même et non plus par ses parents.

Cela correspond à sa parole : « il faut que je m’occupe des affaires de mon Père » : une leçon pour ses parents, et aussi pour nous-mêmes — et comme parents et comme enfants. Dépouillé, comme être unique devant Dieu, Jésus s’occupe des affaires de son Père. Et c’est ce que Dieu nous demande aussi. Tous devons devenir adultes par rapport à ceux que nous recevons comme modèles.

Il s’agit de vivre dans la lumière, la lumière de la parole de Dieu que l’on a appris à écouter… Comme Jésus. Et pour nous autres, par lui. Jean 8, 12 : « Jésus leur parla de nouveau et dit: Moi, je suis la lumière du monde; celui qui me suit ne marchera point dans les ténèbres, mais il aura la lumière de la vie. »

Comme Jésus et, pour nous, par lui. Puisque comme l’annonçait Jean 1, 9 & 12-13 : Il est « la véritable lumière qui, en venant dans le monde, éclaire tout homme. […] À tous ceux qui l’ont reçue, elle a donné le pouvoir de devenir enfants de Dieu, à ceux qui croient en son nom et qui sont nés, non du sang, ni de la volonté de la chair ni de la volonté de l’homme, mais de Dieu. »

C’est ce qui est être éduqué, « conduit hors de » — hors de la captivité rappelle la Pâque —; et aussi hors de l’enfance, et de l’enfance spirituelle, pour être devant Dieu. Et en parallèle, comme parents, il s’agit de laisser être eux-mêmes, face au commandement qu’ils ont appris à connaître, tous ceux que nous tendons à maintenir dans notre dépendance, prolongeant leur enfance ; cela vaut concernant tout ce qui peut devenir une chaîne.

Ici, s’opère comme une nouvelle étape avec ceux avec qui nous sommes liés, nos proches, nos parents — et aussi nos maîtres, et tout ce qu’on peut imaginer — ; s’opère comme une séparation, qui vaut jusqu’à nos biens et nos propres vies. C’est qu’il n’est de vie à l’image du Christ, de vie en vérité, que sous le regard de Dieu. Et cela suppose, tôt ou tard, l’abandon de tout autre regard dont notre vie serait censée dépendre, pas seulement le regard des parents, mais ce que peut conférer un statut social, ou une position dans la société ou dans l’Église. Il s’agit désormais de vivre devant Dieu par la foi seule.

C’est de cela que Jésus montre l’exemple dans ce texte qui nous le présente au Temple à douze ans. Il vit dans sa chair cet exemple-là, et dévoile par la même occasion qui il est : le Fils de Dieu. Il est par nature ce que nous sommes tous appelés à devenir par adoption.

Ici les trois jours de sa disparition revêtent un second sens, annonçant sa résurrection : « proclamé Fils de Dieu par sa résurrection d’entre les mort », selon les mots de Paul.

Comme Jésus nous en donne l’exemple, devenir enfant de Dieu, c’est-à-dire adulte en Christ, requiert la fin, la mort de toute dépendance, y compris du regard d’autrui, dans la famille et hors de la famille, hors de l’Église et dans l’Église. C’est le départ de la libération par l’Évangile.

Alors, un monde nouveau, annonce des nouveaux cieux et de la nouvelle terre, devient possible, un monde de relations humaines reconnaissant l’autre pour lui-même, fût-il son enfant, son père ou sa mère, être créé selon l’image de Dieu, manifestée en Christ et non selon mon image ! Un prochain qui n’est pas limité à nos schémas, mais d’une valeur infinie. Voilà tout un programme, qui n’est pas facultatif : abandonner autrui, à commencer par ses proches, à Dieu. Et, pour cela, nous y abandonner nous-mêmes.

« Tout ce que vous délierez sur la terre sera délié au ciel », est-il dit aux disciples (Mt 18, 18). La parole que vous avez reçu vous délie, vous délivre : « C'est pour la liberté que le Christ nous a libérés. Tenez donc ferme, et ne vous remettez pas sous le joug de l'esclavage » (Gal 5, 1).

Et il demeure fidèle, quoiqu’il arrive — 2 Ti 2, 13. C’est cette parole d’Alliance qui est confirmée pour vous aujourd’hui.

*

Nous pouvons alors recevoir tout à nouveau la parole que le Christ donne pour nous à ses disciples : « là où deux ou trois se trouvent réunis en mon nom, je suis au milieu d’eux. »


RP
Antibes / Confirmations 04.09.11


3 commentaires :

  1. bjr Roland
    je suis contente de pouvoir reprendre la lecture de tes publications .Pour moi le Christ est là que l'on soit seul ou en groupe , je n'ai tj pas compris ce verset .Je suis , sinon entrain de lire le dernier livre de Joseph Doré : "à cause de Jésus "c'est passionnant. Je t'embrasse Isabelle

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  2. Salut Isabelle. Ce verset parle de "faire Eglise".

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  3. Merci Roland c enfin clair

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