Ézéchiel 2, 2-5 ; Psaume 123 ; 2 Corinthiens 12, 7-10 ; Marc 6, 1-6
Ézéchiel 2, 2-5
« N’est-ce pas le charpentier, le fils de Marie et le frère de Jacques, de Josès, de Jude et de Simon ? et ses sœurs ne sont-elles pas ici, chez nous ? »
Voilà qui indique ce qu’est la dimension biologique de nos vies — ici de la vie de Jésus — et donc la façon dont le monde nous perçoit : fils ou fille d’un tel, formé dans telle école, de tel métier, de telle couleur, ou de telle religion, etc. Bref, la dimension repérable de quelqu’un, condition qui permet d’établir des petites cases, et surtout de l’y cantonner…
Eh bien la bonne nouvelle que porte Jésus, c’est que la vérité de nos êtres est cachée en Dieu. Comme il est Fils unique de Dieu, unique devant Dieu, nous sommes appelés à l’être, tout autre chose que ce qui correspond aux cases de nos appartenances, familiales, professionnelles, repérables à l’œil, etc. La vérité de nos êtres est cachée en Dieu. Ce que nous sommes est unique. C’est ce que nous dit en signe le baptême : vous êtes tout autre chose que ce que l’on voit de vous, que ce l’on dit de vous.
Voilà donc Jésus chez les siens, dans son village, cantonné à ce que l’on sait, à ce dont on se souvient le concernant. Normalement, il ne peut qu’être cela. Et voilà qu’il ouvre la bouche, et que ce qu’il dit et fait étonne, dénote…
Voilà que le public prend très mal les paroles et les actes de Jésus. Voilà simplement, en fait, qu’à l’instar des prophètes bibliques et plus tard de ses disciples, il est rejeté.
Est-ce à dire que les prophètes, et Jésus, n’étaient pas à la hauteur de leur public ? Eh bien au sens de l’audimat, peut-être ! Mais au fond, cela n’est que prétexte : ses paroles sont sagesse et vérité — on la lui reconnait même, cette sagesse ! Ce qu’on reproche à Jésus, c’est de déranger — de même qu’à tous ceux qui s’en tiennent au message du Dieu qui libère.
Les prétextes diffèrent : pour Ézéchiel apparemment, c’est qu’on le trouvait un peu borné : ressasser toujours cette vieille loi — qu’on a appris à dépasser, n’est-ce pas ?
Pour Paul, ce qu’il dit est trop compliqué selon uns (cf. 2 Pierre 3, 16), trop paradoxal selon les autres, peu séduisant pour tous. On se creuse depuis 2000 ans pour savoir ce qu’est cette fameuse écharde dans sa chair et qui l’empêche de s’enorgueillir. En tout cas, quoiqu’il en soit, c’est quelque chose qui l’empêche de briller. Et finalement, admet-il, c’est plutôt une bonne chose. C’est ainsi, dans ce qui n’est pas apprécié, que le message de Dieu est communiqué. On ne peut pas annoncer le crucifié en trônant dans la gloire : « ma puissance s’accomplit dans la faiblesse ».
Car au fond, le cœur du problème est là : la vérité n’est pas dans ce qui brille. Elle est cachée pour chacun de nous dans ce qui est humble, au cœur des faiblesses de nos vies. Jésus dans son village a été ignoré des chercheurs de brillance. Ses paroles et ses actes ont eu beau étonner, on pensait qu’il était mal placé pour dire, et faire, ce qu’il disait, aussi sage cela fût-il — surtout parmi ceux qui l’avaient vu grandir…
Une chose demeure : la parole de Dieu dérange. Elle dérange par son humilité-même, qu’on voudrait donc faire taire, ou à défaut, remplacer par des illusions brillantes, genre promesses de bonheur de longévité, de bonne santé, tout cela à bon marché — plutôt que de se voir réduits à prendre nos problèmes à bras de corps.
Que la vérité dérange, c’est une chose toujours à l’ordre du jour. Israël au temps d’Ézéchiel, les Grecs au temps de Paul, qui aujourd’hui ? Qu’on veuille faire taire la vérité est toujours aussi vrai. Les méthodes n’ont pas changé non plus : la soumission à l’illusion et à la facilité, ou l’exclusion.
C’est de tout temps la méthode des faux prophètes. C’est ce que dit Jésus à la suite des prophètes qui l’ont précédé. « Malheur à vous quand on dira du bien de vous : c’est ainsi qu’on agissait à l’égard des faux prophètes. Heureux serez-vous lorsqu’on répandra sur vous toute sorte de propos méprisants : c’est ainsi qu’on faisait à l’égard des vrais prophètes ».
Cela est particulièrement inquiétant pour notre époque d’audimat roi. Particulièrement inquiétant sous cet angle de voir des hommes publics, politiques, ou ecclésiastiques, éviter les propos de fond, qui ennuient, ou surtout pourraient déranger, pour venir au contraire se fondre dans le décor des émissions de variété. Être « sympa »… Et à quand un applaudimètre pour évaluer les prédicateurs ?
La chose est si délicate que l’on ne s’en prendra jamais de face au problème. On attaquera de biais. Paul est trop compliqué, Ézéchiel trop borné. Ne disait-on pas de Jésus : pour qui il se prend ? On l’a vu grandir, on connaît ses parents et ses frères et sœurs, etc.
… En tout cela, on cherche à éviter de confronter nos vrais problèmes, de reconnaître notre faiblesse, là où seulement s’accomplit la puissance de la grâce — par cette vérité qui fait mal et où le Christ peut guérir et consoler vraiment.
La vérité, qui dérange forcément, n’a que faire de briller. Ce sont les chefs de sectes qui esbaudissent leurs disciples, comme les faux prophètes dans la Bible. À Nazareth, on a appris les actes spectaculaires réputés de Jésus. Et ça n'est pas un problème en soi. On voudrait même — pourquoi pas ? — en bénéficier, à condition que ce ne soit pas pour ce qu'ils sont pour Jésus : des signes, qui dérangent forcément. Hors des actes de compassion comme Jésus en accomplit ailleurs aussi, il ne pourra donc y avoir de miracles à Nazareth !
Dieu n'a pas choisi la méthode des coups d'éclats à bon marché. Il a choisi Paul et ses paradoxes compliqués, Moïse qui est bègue, Jérémie entremêlé dans sa timidité d’adolescent qui vient de muer, que sais-je encore ? Mais au risque pour ceux-là d’être en proie à des tracasseries, ou comme antan et ailleurs à des persécutions, et évidemment, pas toujours de front. On leur cherche, aujourd’hui comme antan, des poux dans la tête. Qui veut tuer son chien l’accuse de la rage.
Le vrai problème n’est pas de savoir si tel prophète est trop simple ou trop compliqué. Si on connaît son cousin ou son grand-père, qu’on en fasse un critère dévalorisant comme pour Jésus ou valorisant pour d’autres ; ce n’est pas son jeune âge qui le rend proche des jeunes ou son grand âge qui le rend sage, s’il est bègue ou malade, etc., et que sais-je encore…
La vraie question est posée par Jésus — Mathieu 7, 15-20 : « Gardez-vous des faux prophètes, qui viennent à vous vêtus en brebis, mais qui au-dedans sont des loups rapaces. C’est à leurs fruits que vous les reconnaîtrez. Cueille-t-on des raisins sur un buisson d’épines, ou des figues sur des chardons ? Ainsi tout bon arbre produit de bons fruits, mais l’arbre malade produit de mauvais fruits. Un bon arbre ne peut pas porter de mauvais fruits, ni un arbre malade porter de bons fruits. Tout arbre qui ne produit pas un bon fruit, on le coupe et on le jette au feu. Ainsi donc, c’est à leurs fruits que vous les reconnaîtrez. »
Fruits : il ne s’agit pas de la quantité des disciples, on le comprend. La question, parlant de fruits, raisins et figues, contre chardons et épines est : est-ce que la parole qu’il porte est nourrissante, donc exigeante, car telle est la parole de Dieu, comme le raisin et la figue, là où celle des faux prophètes est desséchante, frustrante. Nourrissante, ce qui ne veut pas dire forcément douce. Douce parfois, âpre d’autres fois, d’apparence compliquée d’autres fois, comme pour la prédication de Paul. La grâce gratuite n’est pas à bon marché.
Un peu comme, si on écoutait nos enfants, on ne les nourrirait que de bonbons, ce qui ne serait pas pour leur mieux. Il leur faut aussi des choses moins douces à avaler, de la viande et pas que du lait dit le Nouveau Testament — ni a fortiori que des bonbons !
C’est cette exigence qui est reprochée aux témoins de la parole de Dieu. Face à Jésus, Ézéchiel ou Paul, c’est toujours ce reproche — pour finalement les faire taire en inventant toute sorte de prétextes pour préférer les donneurs de bonbons ; ceux qui ne dérangent pas.
Les prophètes, les Apôtres et Jésus dérangent. Ils dérangent les petites cases dans lesquelles on ne peut pas les ranger. Et c’est à ce prix qu’ils consolent : on ne peut y ranger personne. Heureux qui a goûté que la parole de Dieu, même sous ce qui est souvent son amertume, est bonne — et qui la cherche là où il la donne.
Ézéchiel 2, 2-5
2 […] Un esprit vint en moi ; il me fit tenir debout ; alors j’entendis celui qui me parlait.2 Corinthiens 12, 7-10
3 Il me dit: « Fils d’homme, je t’envoie vers [...] des gens [...] au visage obstiné et au cœur endurci, je t’envoie vers eux ; tu leur diras: Ainsi parle le Seigneur DIEU.
5 Alors, qu’ils t’écoutent ou ne t’écoutent pas [...], ils sauront qu’il y a un prophète au milieu d’eux.
7 Et parce que ces révélations étaient extraordinaires, pour m’éviter tout orgueil, il a été mis une écharde dans ma chair, un ange de Satan chargé de me frapper, pour m’éviter tout orgueil.Marc 6, 1-6
8 A ce sujet, par trois fois, j’ai prié le Seigneur de l’écarter de moi.
9 Mais il m’a déclaré : « Ma grâce te suffit ; ma puissance donne toute sa mesure dans la faiblesse. » Aussi mettrai-je mon orgueil bien plutôt dans mes faiblesses, afin que repose sur moi la puissance du Christ.
10 Donc je me complais dans les faiblesses, les insultes, les contraintes, les persécutions, et les angoisses pour Christ! Car lorsque je suis faible, c’est alors que je suis fort.
1 Jésus partit de là. Il vient dans sa patrie et ses disciples le suivent.
2 Le jour du sabbat, il se mit à enseigner dans la synagogue. Frappés d’étonnement, de nombreux auditeurs disaient : « D’où cela lui vient-il ? Et quelle est cette sagesse qui lui a été donnée, si bien que même des miracles se font par ses mains ?
3 N’est-ce pas le charpentier, le fils de Marie et le frère de Jacques, de Josès, de Jude et de Simon ? et ses sœurs ne sont-elles pas ici, chez nous ? » Et il était pour eux une occasion de chute.
4 Jésus leur disait : « Un prophète n’est méprisé que dans sa patrie, parmi ses parents et dans sa maison. »
5 Et il ne pouvait faire là aucun miracle ; pourtant il guérit quelques malades en leur imposant les mains.
6 Et il s’étonnait de ce qu’ils ne croyaient pas. Il parcourait les villages des environs en enseignant.
*
« N’est-ce pas le charpentier, le fils de Marie et le frère de Jacques, de Josès, de Jude et de Simon ? et ses sœurs ne sont-elles pas ici, chez nous ? »
Voilà qui indique ce qu’est la dimension biologique de nos vies — ici de la vie de Jésus — et donc la façon dont le monde nous perçoit : fils ou fille d’un tel, formé dans telle école, de tel métier, de telle couleur, ou de telle religion, etc. Bref, la dimension repérable de quelqu’un, condition qui permet d’établir des petites cases, et surtout de l’y cantonner…
Eh bien la bonne nouvelle que porte Jésus, c’est que la vérité de nos êtres est cachée en Dieu. Comme il est Fils unique de Dieu, unique devant Dieu, nous sommes appelés à l’être, tout autre chose que ce qui correspond aux cases de nos appartenances, familiales, professionnelles, repérables à l’œil, etc. La vérité de nos êtres est cachée en Dieu. Ce que nous sommes est unique. C’est ce que nous dit en signe le baptême : vous êtes tout autre chose que ce que l’on voit de vous, que ce l’on dit de vous.
Voilà donc Jésus chez les siens, dans son village, cantonné à ce que l’on sait, à ce dont on se souvient le concernant. Normalement, il ne peut qu’être cela. Et voilà qu’il ouvre la bouche, et que ce qu’il dit et fait étonne, dénote…
Voilà que le public prend très mal les paroles et les actes de Jésus. Voilà simplement, en fait, qu’à l’instar des prophètes bibliques et plus tard de ses disciples, il est rejeté.
Est-ce à dire que les prophètes, et Jésus, n’étaient pas à la hauteur de leur public ? Eh bien au sens de l’audimat, peut-être ! Mais au fond, cela n’est que prétexte : ses paroles sont sagesse et vérité — on la lui reconnait même, cette sagesse ! Ce qu’on reproche à Jésus, c’est de déranger — de même qu’à tous ceux qui s’en tiennent au message du Dieu qui libère.
Les prétextes diffèrent : pour Ézéchiel apparemment, c’est qu’on le trouvait un peu borné : ressasser toujours cette vieille loi — qu’on a appris à dépasser, n’est-ce pas ?
Pour Paul, ce qu’il dit est trop compliqué selon uns (cf. 2 Pierre 3, 16), trop paradoxal selon les autres, peu séduisant pour tous. On se creuse depuis 2000 ans pour savoir ce qu’est cette fameuse écharde dans sa chair et qui l’empêche de s’enorgueillir. En tout cas, quoiqu’il en soit, c’est quelque chose qui l’empêche de briller. Et finalement, admet-il, c’est plutôt une bonne chose. C’est ainsi, dans ce qui n’est pas apprécié, que le message de Dieu est communiqué. On ne peut pas annoncer le crucifié en trônant dans la gloire : « ma puissance s’accomplit dans la faiblesse ».
Car au fond, le cœur du problème est là : la vérité n’est pas dans ce qui brille. Elle est cachée pour chacun de nous dans ce qui est humble, au cœur des faiblesses de nos vies. Jésus dans son village a été ignoré des chercheurs de brillance. Ses paroles et ses actes ont eu beau étonner, on pensait qu’il était mal placé pour dire, et faire, ce qu’il disait, aussi sage cela fût-il — surtout parmi ceux qui l’avaient vu grandir…
Une chose demeure : la parole de Dieu dérange. Elle dérange par son humilité-même, qu’on voudrait donc faire taire, ou à défaut, remplacer par des illusions brillantes, genre promesses de bonheur de longévité, de bonne santé, tout cela à bon marché — plutôt que de se voir réduits à prendre nos problèmes à bras de corps.
Que la vérité dérange, c’est une chose toujours à l’ordre du jour. Israël au temps d’Ézéchiel, les Grecs au temps de Paul, qui aujourd’hui ? Qu’on veuille faire taire la vérité est toujours aussi vrai. Les méthodes n’ont pas changé non plus : la soumission à l’illusion et à la facilité, ou l’exclusion.
C’est de tout temps la méthode des faux prophètes. C’est ce que dit Jésus à la suite des prophètes qui l’ont précédé. « Malheur à vous quand on dira du bien de vous : c’est ainsi qu’on agissait à l’égard des faux prophètes. Heureux serez-vous lorsqu’on répandra sur vous toute sorte de propos méprisants : c’est ainsi qu’on faisait à l’égard des vrais prophètes ».
Cela est particulièrement inquiétant pour notre époque d’audimat roi. Particulièrement inquiétant sous cet angle de voir des hommes publics, politiques, ou ecclésiastiques, éviter les propos de fond, qui ennuient, ou surtout pourraient déranger, pour venir au contraire se fondre dans le décor des émissions de variété. Être « sympa »… Et à quand un applaudimètre pour évaluer les prédicateurs ?
La chose est si délicate que l’on ne s’en prendra jamais de face au problème. On attaquera de biais. Paul est trop compliqué, Ézéchiel trop borné. Ne disait-on pas de Jésus : pour qui il se prend ? On l’a vu grandir, on connaît ses parents et ses frères et sœurs, etc.
… En tout cela, on cherche à éviter de confronter nos vrais problèmes, de reconnaître notre faiblesse, là où seulement s’accomplit la puissance de la grâce — par cette vérité qui fait mal et où le Christ peut guérir et consoler vraiment.
La vérité, qui dérange forcément, n’a que faire de briller. Ce sont les chefs de sectes qui esbaudissent leurs disciples, comme les faux prophètes dans la Bible. À Nazareth, on a appris les actes spectaculaires réputés de Jésus. Et ça n'est pas un problème en soi. On voudrait même — pourquoi pas ? — en bénéficier, à condition que ce ne soit pas pour ce qu'ils sont pour Jésus : des signes, qui dérangent forcément. Hors des actes de compassion comme Jésus en accomplit ailleurs aussi, il ne pourra donc y avoir de miracles à Nazareth !
Dieu n'a pas choisi la méthode des coups d'éclats à bon marché. Il a choisi Paul et ses paradoxes compliqués, Moïse qui est bègue, Jérémie entremêlé dans sa timidité d’adolescent qui vient de muer, que sais-je encore ? Mais au risque pour ceux-là d’être en proie à des tracasseries, ou comme antan et ailleurs à des persécutions, et évidemment, pas toujours de front. On leur cherche, aujourd’hui comme antan, des poux dans la tête. Qui veut tuer son chien l’accuse de la rage.
*
Le vrai problème n’est pas de savoir si tel prophète est trop simple ou trop compliqué. Si on connaît son cousin ou son grand-père, qu’on en fasse un critère dévalorisant comme pour Jésus ou valorisant pour d’autres ; ce n’est pas son jeune âge qui le rend proche des jeunes ou son grand âge qui le rend sage, s’il est bègue ou malade, etc., et que sais-je encore…
La vraie question est posée par Jésus — Mathieu 7, 15-20 : « Gardez-vous des faux prophètes, qui viennent à vous vêtus en brebis, mais qui au-dedans sont des loups rapaces. C’est à leurs fruits que vous les reconnaîtrez. Cueille-t-on des raisins sur un buisson d’épines, ou des figues sur des chardons ? Ainsi tout bon arbre produit de bons fruits, mais l’arbre malade produit de mauvais fruits. Un bon arbre ne peut pas porter de mauvais fruits, ni un arbre malade porter de bons fruits. Tout arbre qui ne produit pas un bon fruit, on le coupe et on le jette au feu. Ainsi donc, c’est à leurs fruits que vous les reconnaîtrez. »
Fruits : il ne s’agit pas de la quantité des disciples, on le comprend. La question, parlant de fruits, raisins et figues, contre chardons et épines est : est-ce que la parole qu’il porte est nourrissante, donc exigeante, car telle est la parole de Dieu, comme le raisin et la figue, là où celle des faux prophètes est desséchante, frustrante. Nourrissante, ce qui ne veut pas dire forcément douce. Douce parfois, âpre d’autres fois, d’apparence compliquée d’autres fois, comme pour la prédication de Paul. La grâce gratuite n’est pas à bon marché.
Un peu comme, si on écoutait nos enfants, on ne les nourrirait que de bonbons, ce qui ne serait pas pour leur mieux. Il leur faut aussi des choses moins douces à avaler, de la viande et pas que du lait dit le Nouveau Testament — ni a fortiori que des bonbons !
C’est cette exigence qui est reprochée aux témoins de la parole de Dieu. Face à Jésus, Ézéchiel ou Paul, c’est toujours ce reproche — pour finalement les faire taire en inventant toute sorte de prétextes pour préférer les donneurs de bonbons ; ceux qui ne dérangent pas.
Les prophètes, les Apôtres et Jésus dérangent. Ils dérangent les petites cases dans lesquelles on ne peut pas les ranger. Et c’est à ce prix qu’ils consolent : on ne peut y ranger personne. Heureux qui a goûté que la parole de Dieu, même sous ce qui est souvent son amertume, est bonne — et qui la cherche là où il la donne.
R.P., Poitiers, 05.07.15
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