dimanche 10 décembre 2017

"Allons donc jusqu’à Bethléem"




Ésaïe 40, 1-11 ; Psaume 85 ; 2 Pierre 3, 8-14 ; Marc 1, 1-11

Ésaïe 40, 1-11
1 Consolez, consolez mon peuple, dit votre Dieu.
2 Parlez au cœur de Jérusalem, et criez lui Que sa servitude est finie, Que son iniquité est expiée, Qu’elle a reçu de la main de l’Éternel Au double de tous ses péchés.
3 Une voix crie : Préparez au désert le chemin de l’Éternel, Aplanissez dans les lieux arides Une route pour notre Dieu.
4 Que toute vallée soit exhaussée, Que toute montagne et toute colline soient abaissées ! Que les coteaux se changent en plaines, Et les défilés étroits en vallons !
5 Alors la gloire de l’Éternel sera révélée, Et au même instant toute chair la verra ; Car la bouche de l’Éternel a parlé.
6 Une voix dit : Crie ! — Et il répond : Que crierai-je ? Toute chair est comme l’herbe, Et tout son éclat comme la fleur des champs.
7 L’herbe sèche, la fleur tombe, Quand le vent de l’Éternel souffle dessus. — Certainement le peuple est comme l’herbe :
8 L’herbe sèche, la fleur tombe ; Mais la parole de notre Dieu subsiste éternellement.
9 Monte sur une haute montagne, Sion, pour publier la bonne nouvelle ; Élève avec force ta voix, Jérusalem, pour publier la bonne nouvelle ; Élève ta voix, ne crains point, Dis aux villes de Juda : Voici votre Dieu !
10 Voici, le Seigneur, l’Éternel vient avec puissance, Et de son bras il commande ; Voici, le salaire est avec lui, Et les rétributions le précèdent.
11 Comme un berger, il paîtra son troupeau, Il prendra les agneaux dans ses bras, Et les portera dans son sein ; Il conduira les brebis qui allaitent.

Marc 1, 1-4
1 Commencement de l’Évangile de Jésus-Christ, Fils de Dieu.
2 Selon ce qui est écrit dans Ésaïe, le prophète : Voici, j’envoie devant toi mon messager, Qui préparera ton chemin ;
3 C’est la voix de celui qui crie dans le désert : Préparez le chemin du Seigneur, Aplanissez ses sentiers.
4 Jean parut, baptisant dans le désert, et prêchant le baptême de repentance/de retour, pour la rémission des péchés.

*

Luc 2, 13-15
13 Et soudain il se joignit à l’ange une multitude de l’armée céleste, qui louait Dieu et disait :
14 "Gloire à Dieu au plus haut des cieux et sur la terre paix pour ses bien-aimés."
15 Lorsque les anges se furent éloignés d’eux vers le ciel, les bergers se dirent les uns aux autres : Allons donc jusqu’à Bethléem, et voyons ce qui est arrivé, ce que le Seigneur nous a fait connaître.

*

« Gloire à Dieu au plus haut des cieux » ont chanté les anges — « multitude de l’armée céleste ». Il s’est passé là quelque chose d’extraordinaire, qui fait chanter toute la Création visible et invisible — « toute chair verra la gloire du Seigneur » (Ésaïe (40, 5).

D’un côté toute la puissance — la Création et ses fondements célestes, les armées célestes ; de l’autre l’humilité de la crèche où naît le souverain de toutes ces armées célestes, toute la « multitude de l’armée céleste »… « la gloire de l’Éternel sera révélée », écrit Ésaïe (40, v. 5).

Car voilà donc que la chose essentielle, celle que chantent les anges, s’est passée à Bethléem, s’est passée dans l’humilité, et concerne celui qui vaut que toutes les puissances de la Création y joignent leur louange.

Cela concerne les bergers — disant « allons donc jusqu’à Bethléem » —, et nous concerne avec eux. Cela aussi les anges le clament ! C’est le deuxième aspect de leur chant de louange : « paix sur la terre parmi les hommes de la bienveillance ».

Cela en écho à la parole de Dieu à Salomon accomplissant la construction du Temple : « si mon peuple sur qui est invoqué mon nom s’humilie, prie, et cherche ma face, et s’il se détourne de ses mauvaises voies, — je l’exaucerai des cieux, je lui pardonnerai son péché, et je guérirai son pays. » (2 Chroniques 7, 14).

*

La grâce immense que fait Dieu à chacun de nous, c'est de nous rencontrer dans la plus humble des humilités. C'est la révélation de la gloire infinie de Dieu, proclamée au livre d'Ésaïe et chantée par les anges, qui est donnée dans l'humilité de sa présence. C'est sa faveur pour nous qui nous donne de revenir à ce que nous sommes, au plus petit de ce que nous sommes, devant l'infini de ce Dieu d'infini célébré par les anges. C'est la parole d'ÉsaÏe reprise par Jean le Baptiste, la voix dans le désert prêchant « revenez », « trouvez ma faveur dans l'humilité », dit Dieu — « si mon peuple s’humilie » —, et promettant la paix.

La paix de Dieu, sa bienveillance accordée pleinement, et signifiée dans la banalité que porte l’apparence de l’enfant de la crèche pour qui s’élève la louange de toute la Création, cette paix se donne à expérimenter dans la bienveillance qui en découle parmi les hommes, puis depuis les hommes qui deviennent par leur bienveillance autant de signes de ce que la bienveillance divine est effectivement octroyée — et qu’elle se répand.

Là est tout le contraste que nous donne ce chant de louange angélique entre la puissance divine dans la Création, la magnificence du Créateur, et son effacement dans l’enfant en lequel il vient à nous.

*

À ce moment le récit entre dans toute son humilité — « si mon peuple s’humilie » —, venir aux pieds du tout-petit, ce que nous savons communément nous figurer : « Marie, Joseph, et le nouveau-né dans la crèche ». Mais là est tout le salut ! « Après l’avoir vu, les bergers racontèrent ce qui leur avait été dit au sujet de ce petit enfant. » Rien de plus à dire !

Qu’à s’étonner, comme l’ont fait les auditeurs des bergers, et à reprendre nos chemins avec les bergers qui « s’en retournèrent en glorifiant et louant Dieu pour tout ce qu’ils avaient entendu et vu ».

Le Créateur tout-puissant célébré par les armées célestes a bien répandu sa bienveillance, depuis Bethléem, pour que comme en cascades cette bienveillance qui jaillit de la crèche de l’enfant jusqu’en sa résurrection, se répande désormais parmi les hommes et les femmes ce monde et par les hommes et les femmes de ce monde.

*

Et cela se donne dans ce simple dévoilement : « Christ, Dieu et homme, ne fait qu’une seule personne. Si je veux trouver Dieu, je vais le chercher dans l’humanité du Christ. Aussi, quand nous réfléchissons à Dieu, nous faut-il perdre de vue l’espace et le temps, car Notre-Seigneur Dieu, notre créateur est infiniment plus haut que l’espace, le temps et la création. » J’ai cité Martin Luther (Propos de Table, Aubier 1992, p. 204).

C'est là le « commencement de l’Évangile de Jésus Christ, Fils de Dieu » (Marc 1, 1). Dans et l’espace et le temps, le Dieu d'éternité nous a rejoints. Selon Luc, il a donné ce signe de sa présence aux bergers, puis par eux à tous : « un nouveau-né dans une crèche ». Nous aussi, « allons donc jusqu’à Bethléem »… « Commencement de l’Évangile de Jésus Christ, Fils de Dieu » !


R.P. Poitiers, 10.12.17


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