Ésaïe 7.10-16 ; Psaume 24 ; Romains 1.1-7 ; Matthieu 1.18-25
Ésaïe 7, 10-16
Matthieu 1, 18-25
Nous voici au terme du cycle de l’Avent, avec Joseph. Lorsque Matthieu nous présente Joseph, il nous présente un homme qui a déjà pleinement assumé ce qui lui arrive, ce qui, a priori, n’a rien de réjouissant, compromettant son avenir. Homme juste que Joseph, dit le texte, qui ne veut pas exposer sa fiancée à la honte, ni à la menace que son état pourrait faire peser sur elle ; elle dont il a pourtant d’abord pensé qu’elle… lui en avait préféré un autre… avant même le mariage, comme le peuple avec son Dieu, aurait dit le prophète Osée que va citer Matthieu un peu plus loin (Mt 2, 15 / Os 11, 1). Voilà ce qu’a dessiné le texte.
Joseph, homme juste, dit Matthieu, homme de pardon, donc, comme le Joseph de la Genèse pardonnant à ses frères. Cet autre Joseph, celui de Marie, pardonnant… non pas à Marie : il croit la vision angélique qui l’a assuré de son innocence. Il pardonne… à Dieu lui-même ! Et adoptant Jésus.
Mais quel rapport entre l’adoption de Jésus par Joseph et nous ? En quoi cette naissance, la naissance de cet enfant déjà Roi, me concerne ? En quoi dit-t-elle le retour à Dieu et le terme du cheminement de son peuple ? Qu’en est-il pour moi au-delà de la simple histoire de cette jeune fille, Marie, qui a un enfant sans que son fiancé n’y soit pour rien ? Eh bien, au-delà de cette superbe histoire de pardon et d’adoption, l’Évangile nous offre la parole du salut en Jésus-Christ.
Joseph adopte Jésus comme son enfant. Comme le nom même de Jésus l’indique (1, 21), il porte le salut du Seigneur ; le nom Jésus signifiant « le Seigneur sauve » ; il est lui-même en sa chair, la lumière et la Parole de Dieu, notre vie éternelle, le projet de Dieu pour nous.
Eh bien, c’est cela qu’il s’agit pour nous aussi d’adopter : le salut de Dieu, son projet pour nous, même dérageant — pour que s’accomplisse la promesse selon laquelle Dieu sera avec nous : Emmanuel. Dans un signe qui à l’origine annonce et la délivrance de Jérusalem menacée par Samarie alliée à Damas, et la réconciliation de tout le peuple, de Jérusalem et Samarie, et de toutes les nations.
Où se résout le fameux dilemme, à savoir : mais enfin, comment s’appelle-t-il, ce petit : Jésus ou Emmanuel ? Le Seigneur sauve, selon le nom « Jésus » — et ce salut est sa présence avec nous — Emmanuel, Dieu avec nous ; selon la promesse de la bénédiction : « le Seigneur est avec toi ». Jésus présence de Dieu parmi nous, demeure de Dieu, son Temple, qu’il nous faut être à notre tour.
Pour cela, il nous appartient d’accepter à notre tour ce que Joseph a accepté : accepter que la réalité la plus importante de notre vie ne vienne pas de nous-mêmes, et même nous dérange, comme un enfant qui ne vient pas de nous. Le salut éternel n’est pas quelque chose que nous devons produire par nous-mêmes, il est à recevoir, à adopter comme Joseph adopte dans la foi l’enfant que porte Marie. Le salut de Dieu est ainsi comme une réalité nouvelle qui nous surprend et nous dépasse, une réalité vivante que l’on ne peut connaître qu’en acceptant de la recevoir et de l’aimer : « Dieu avec nous ».
Joseph a du mal à accepter cette naissance, nous avons du mal à adopter le salut de Dieu. Cela choque notre volonté naturelle, celle d’être, tout seul, artisan de notre vie. Mais c’est vital. C’est déjà une bonne idée de placer son espérance, sa foi, en quelque chose de plus grand que soi-même. C’est déjà bien, par exemple, d’avoir foi en un idéal.
Mais plus que cela, en choisissant d’adopter cet enfant, Joseph reconnaît à Dieu sa place au-dessus de lui-même. Et il nous indique à l’avance que Jésus vient pour une mission inouïe : notre salut éternel.
Joseph, alors, a choisi : placer sa foi en Dieu, et faire passer ses propres aspirations après.
C'est ainsi que l’accomplissement de nos vies se fait quand nous sommes habités, transformés, fécondés par la présence de Dieu. C’est pourquoi Jésus est Emmanuel, c’est-à-dire « Dieu avec nous ».
Cette transformation, cette nouvelle dimension de notre vie est au-delà des mots de notre quotidien.
Aussi les témoins de Jésus en parlent-ils par images — disant que nous pouvons devenir « enfants de Dieu », que nous pouvons « naître d’en haut », « naître de Dieu », « naître du souffle de Dieu ».
Autant d’expressions qui nous disent aussi que notre naissance spirituelle est quelque chose qui doit se vivre dans notre quotidien. Cette vie nouvelle ne peut entrer dans notre vie qu’à l’exemple de la naissance du Christ, Dieu venant féconder ce que nous sommes pour qu’il en naisse quelque chose de nouveau et d'éternel.
Notre vie biologique pour heureuse qu’elle puisse être, est évidemment limitée en durée et en qualité. Quelle qu’elle soit, Dieu vient dans notre propre histoire, d’Abraham à nos jours, et il y vient comme de l’extérieur, pour nous féconder et faire grandir en nous une réalité nouvelle. Comme l’Esprit de Dieu porte la parole qui fait germer le corps de Marie.
Cette présence, tout en nouveauté, de la vie divine dans le quotidien de Marie est à l’origine de la conception de l’être nouveau qu’est Jésus — qui est ainsi fils de Dieu et d’une fille des hommes.
Notre existence est faite pour être fécondée par la présence permanente de la nouveauté de vie en Dieu, au cœur de notre réalité biologique, intellectuelle, sociale, artistique, professionnelle, etc.
Sans cette fécondation, nous restons stériles pour Dieu. Une vie ignorant sa portée spirituelle oublierait de manière illusoire ne serait-ce que le vieillissement inexorable de notre corps, en se réfugiant dans l’agitation. Attitude et stérile et frustrante, sans avenir.
En sens inverse, nier la dimension matérielle et concrète de nos êtres appelés comme tels à être fécondés par la parole de Dieu, conduit également à une vie évidemment incomplète, selon que « qui veut faire l’ange fait la bête ».
Pour être ce que nous sommes selon l’image du Christ, nous devons naître comme lui. C'est-à-dire, nous concernant, recevoir la présence de Dieu au cœur de notre histoire personnelle, pour que nous devenions enfant de Dieu selon notre humanité.
La présence de Dieu dans notre vie ne remplace pas ce que nous sommes, elle le féconde. Et ce nous-mêmes qui naît de la sorte est effectivement un être nouveau, mais c’est en même temps ce que nous sommes — en plénitude, comme réalité nouvelle fondée en Dieu.
C’est de la sorte qu’en Jésus, Dieu accomplit le salut dans le concret de nos vies.
Ésaïe 7, 10-16
10 Le Seigneur dit encore à Achaz :
11 Demande un signe au Seigneur, ton Dieu, soit dans les profondeurs du séjour des morts, soit dans les lieux les plus élevés.
12 Achaz répondit : Je ne demanderai rien, je ne provoquerai pas le Seigneur.
13 Ésaïe dit alors : Écoutez, je vous prie, maison de David ! Ne vous suffit-il pas de lasser la patience des hommes, que vous lassiez encore celle de mon Dieu ?
14 C'est pourquoi le Seigneur lui-même vous donnera un signe : la jeune fille est enceinte, elle mettra au monde un fils et l'appellera du nom d'Immanou-El (« Dieu est avec nous ») .
15 Il se nourrira de lait fermenté et de miel quand il saura rejeter ce qui est mauvais et choisir ce qui est bon.
16 Mais avant que l'enfant sache rejeter ce qui est mauvais et choisir ce qui est bon, la terre des deux rois qui t'épouvantent sera abandonnée.
Matthieu 1, 18-25
18 Voici comment arriva la naissance de Jésus-Christ. Marie, sa mère, était fiancée à Joseph ; avant leur union, elle se trouva enceinte par le fait de l'Esprit saint.
19 Joseph, son mari, qui était juste et qui ne voulait pas la dénoncer publiquement, décida de la répudier en secret.
20 Comme il y pensait, l'ange du Seigneur lui apparut en rêve et dit : Joseph, fils de David, n'aie pas peur de prendre chez toi Marie, ta femme, car l'enfant qu'elle a conçu vient de l'Esprit saint ;
21 elle mettra au monde un fils, et tu l'appelleras du nom de Jésus, car c'est lui qui sauvera son peuple de ses péchés.
22 Tout cela arriva afin que s'accomplisse ce que le Seigneur avait dit par l'entremise du prophète :
23 "La vierge sera enceinte ; elle mettra au monde un fils et on l'appellera du nom d'Emmanuel", ce qui se traduit : Dieu avec nous.
24 À son réveil, Joseph fit ce que l'ange du Seigneur lui avait ordonné, et il prit sa femme chez lui.
25 Mais il ne la connut pas jusqu'à ce qu'elle eût mis au monde un fils, qu'il appela du nom de Jésus.
*
Nous voici au terme du cycle de l’Avent, avec Joseph. Lorsque Matthieu nous présente Joseph, il nous présente un homme qui a déjà pleinement assumé ce qui lui arrive, ce qui, a priori, n’a rien de réjouissant, compromettant son avenir. Homme juste que Joseph, dit le texte, qui ne veut pas exposer sa fiancée à la honte, ni à la menace que son état pourrait faire peser sur elle ; elle dont il a pourtant d’abord pensé qu’elle… lui en avait préféré un autre… avant même le mariage, comme le peuple avec son Dieu, aurait dit le prophète Osée que va citer Matthieu un peu plus loin (Mt 2, 15 / Os 11, 1). Voilà ce qu’a dessiné le texte.
Joseph, homme juste, dit Matthieu, homme de pardon, donc, comme le Joseph de la Genèse pardonnant à ses frères. Cet autre Joseph, celui de Marie, pardonnant… non pas à Marie : il croit la vision angélique qui l’a assuré de son innocence. Il pardonne… à Dieu lui-même ! Et adoptant Jésus.
Mais quel rapport entre l’adoption de Jésus par Joseph et nous ? En quoi cette naissance, la naissance de cet enfant déjà Roi, me concerne ? En quoi dit-t-elle le retour à Dieu et le terme du cheminement de son peuple ? Qu’en est-il pour moi au-delà de la simple histoire de cette jeune fille, Marie, qui a un enfant sans que son fiancé n’y soit pour rien ? Eh bien, au-delà de cette superbe histoire de pardon et d’adoption, l’Évangile nous offre la parole du salut en Jésus-Christ.
Joseph adopte Jésus comme son enfant. Comme le nom même de Jésus l’indique (1, 21), il porte le salut du Seigneur ; le nom Jésus signifiant « le Seigneur sauve » ; il est lui-même en sa chair, la lumière et la Parole de Dieu, notre vie éternelle, le projet de Dieu pour nous.
Eh bien, c’est cela qu’il s’agit pour nous aussi d’adopter : le salut de Dieu, son projet pour nous, même dérageant — pour que s’accomplisse la promesse selon laquelle Dieu sera avec nous : Emmanuel. Dans un signe qui à l’origine annonce et la délivrance de Jérusalem menacée par Samarie alliée à Damas, et la réconciliation de tout le peuple, de Jérusalem et Samarie, et de toutes les nations.
Où se résout le fameux dilemme, à savoir : mais enfin, comment s’appelle-t-il, ce petit : Jésus ou Emmanuel ? Le Seigneur sauve, selon le nom « Jésus » — et ce salut est sa présence avec nous — Emmanuel, Dieu avec nous ; selon la promesse de la bénédiction : « le Seigneur est avec toi ». Jésus présence de Dieu parmi nous, demeure de Dieu, son Temple, qu’il nous faut être à notre tour.
Pour cela, il nous appartient d’accepter à notre tour ce que Joseph a accepté : accepter que la réalité la plus importante de notre vie ne vienne pas de nous-mêmes, et même nous dérange, comme un enfant qui ne vient pas de nous. Le salut éternel n’est pas quelque chose que nous devons produire par nous-mêmes, il est à recevoir, à adopter comme Joseph adopte dans la foi l’enfant que porte Marie. Le salut de Dieu est ainsi comme une réalité nouvelle qui nous surprend et nous dépasse, une réalité vivante que l’on ne peut connaître qu’en acceptant de la recevoir et de l’aimer : « Dieu avec nous ».
Joseph a du mal à accepter cette naissance, nous avons du mal à adopter le salut de Dieu. Cela choque notre volonté naturelle, celle d’être, tout seul, artisan de notre vie. Mais c’est vital. C’est déjà une bonne idée de placer son espérance, sa foi, en quelque chose de plus grand que soi-même. C’est déjà bien, par exemple, d’avoir foi en un idéal.
Mais plus que cela, en choisissant d’adopter cet enfant, Joseph reconnaît à Dieu sa place au-dessus de lui-même. Et il nous indique à l’avance que Jésus vient pour une mission inouïe : notre salut éternel.
Joseph, alors, a choisi : placer sa foi en Dieu, et faire passer ses propres aspirations après.
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C'est ainsi que l’accomplissement de nos vies se fait quand nous sommes habités, transformés, fécondés par la présence de Dieu. C’est pourquoi Jésus est Emmanuel, c’est-à-dire « Dieu avec nous ».
Cette transformation, cette nouvelle dimension de notre vie est au-delà des mots de notre quotidien.
Aussi les témoins de Jésus en parlent-ils par images — disant que nous pouvons devenir « enfants de Dieu », que nous pouvons « naître d’en haut », « naître de Dieu », « naître du souffle de Dieu ».
Autant d’expressions qui nous disent aussi que notre naissance spirituelle est quelque chose qui doit se vivre dans notre quotidien. Cette vie nouvelle ne peut entrer dans notre vie qu’à l’exemple de la naissance du Christ, Dieu venant féconder ce que nous sommes pour qu’il en naisse quelque chose de nouveau et d'éternel.
Notre vie biologique pour heureuse qu’elle puisse être, est évidemment limitée en durée et en qualité. Quelle qu’elle soit, Dieu vient dans notre propre histoire, d’Abraham à nos jours, et il y vient comme de l’extérieur, pour nous féconder et faire grandir en nous une réalité nouvelle. Comme l’Esprit de Dieu porte la parole qui fait germer le corps de Marie.
Cette présence, tout en nouveauté, de la vie divine dans le quotidien de Marie est à l’origine de la conception de l’être nouveau qu’est Jésus — qui est ainsi fils de Dieu et d’une fille des hommes.
Notre existence est faite pour être fécondée par la présence permanente de la nouveauté de vie en Dieu, au cœur de notre réalité biologique, intellectuelle, sociale, artistique, professionnelle, etc.
Sans cette fécondation, nous restons stériles pour Dieu. Une vie ignorant sa portée spirituelle oublierait de manière illusoire ne serait-ce que le vieillissement inexorable de notre corps, en se réfugiant dans l’agitation. Attitude et stérile et frustrante, sans avenir.
En sens inverse, nier la dimension matérielle et concrète de nos êtres appelés comme tels à être fécondés par la parole de Dieu, conduit également à une vie évidemment incomplète, selon que « qui veut faire l’ange fait la bête ».
Pour être ce que nous sommes selon l’image du Christ, nous devons naître comme lui. C'est-à-dire, nous concernant, recevoir la présence de Dieu au cœur de notre histoire personnelle, pour que nous devenions enfant de Dieu selon notre humanité.
La présence de Dieu dans notre vie ne remplace pas ce que nous sommes, elle le féconde. Et ce nous-mêmes qui naît de la sorte est effectivement un être nouveau, mais c’est en même temps ce que nous sommes — en plénitude, comme réalité nouvelle fondée en Dieu.
C’est de la sorte qu’en Jésus, Dieu accomplit le salut dans le concret de nos vies.
RP, Poitiers, 4e dimanche de l'Avent, 22.12.19
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