Exode 3.1-15 ; Psaume 103 ; 1 Corinthiens 10.1-12 ; Luc 13.1-9
Luc 13.1-9
On est en route vers Jérusalem. “Des gens” rapportent à Jésus qu'un groupe de pèlerins galiléens y a été massacré par Pilate. Un rapport plein de sous-entendus. Ces Galiléens n'ont-ils pas eu là un signe menaçant ? Et toi Jésus, Galiléen, quelle est ton interprétation… ?
Jésus refuse évidemment de voir un quelconque lien de cause à effet entre on ne sait quel regard défavorable de Dieu et la violence qui a atteint les victimes. Mais derrière la question, de façon invisible, le problème est la division du peuple face à l’ennemi romain, entre Judéens et Galiléens. Ce que Jésus fait apparaître en rappelant une autre catastrophe : l'écroulement de la tour de Siloé, ayant tué dix-huit personnes, judéennes celles-là, de Jérusalem (v. 4), et non point galiléennes.
Alors comprenez, souligne Jésus, qu’il n'y a pas à considérer les victimes quelles qu’elles soient comme plus coupables que les autres (ces Galiléens-là et ces Judéens-là ne sont ni plus ni moins pécheurs que les autres - v. 2), mais il s’agit d’y voir une menace qui pèse sur tous ; les divisions du peuple déboucheront sur sa destruction par Rome, la nation de Pilate, qui n’en a pas que contre le seuls Galiléens. Toute division est affaiblissement de tous, ici Judéens comme Galiléens, — ce qui appelle à se convertir, c’est-à-dire à se tourner vers Dieu, se repentir : “si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous de la même manière” (v. 5). Tous !
Et Jésus d'illustrer son appel par une parabole, la parabole du figuier stérile. Si le massacre qui a frappé les Galiléens semble donner raison à ceux qui prétendent mieux savoir que faire, ou être plus fidèles, ou moins pécheurs, leur insensibilité, leur manque de compassion fraternelle face à ce sort cruel, dévoile qu’ils ne savent trouver là que la justification terrible d'un stérile contentement de soi…
À cette stérilité, comme au figuier stérile, il faut du fumier, excrément, signe de pourrissement, de déperdition ; mais si cette déperdition est reconnue et confessée, le fumier peut devenir signe annonciateur d’une nouvelle fécondité : “si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous de la même manière”, Judéens comme Galiléens. Si vous reconnaissez le pourquoi de ce fumier, il deviendra promesse de renouveau. Convertissez-vous, repentez-vous : c’est Dieu seul qui fait croître, c’est lui qui, pour le dire avec les Actes des Apôtres (2:47), ajoute à son peuple ceux qu’il sauve lui-même. Cela ne dépend que de sa grâce.
Paul a retenu la leçon, appliquée à l'Église : c’est sans doute le propos essentiel d’une épître comme la première aux Corinthiens, qu’il commençait en écrivant : “Je vous exhorte, frères [et sœurs], par le nom de notre Seigneur Jésus Christ, […] à ne point avoir de divisions parmi vous, mais à être parfaitement unis dans un même esprit et dans un même sentiment” (1 Co 1:10). Et devenant concret, au ch. 11, v. 18 : “j'apprends que, lorsque vous vous réunissez en assemblée, il y a parmi vous des divisions, et je le crois en partie”.
Façon de dire aux Corinthiens, par un trait d'ironie, que le problème concerne bien leur Église. Divisions en écarts sociaux non résolus, en clans, etc. Face au drame de divisions qui, derrière les sourires convenus, ne disent pas leur nom, mais transpirent de partout, Paul ira jusqu’à prôner l’abolition des repas d'Église à Corinthe, ces repas censés être fraternels, mais devenus de fait lieu d’hypocrisie. Mieux vaut arrêter, écrit-il : vous pouvez manger chez vous (1 Co 11:22) !
Après quoi, ch. 12, il développe son propos sur le corps qui ne peut qu’être un pour fonctionner, et sur les dons de l’Église, le don le plus désirable étant l’amour fraternel (1 Co 13) ; écho aux propos qu’il tient dans plusieurs épîtres. Je cite, petit florilège non exhaustif : “Soumettez-vous les uns aux autres” (Ep 5:21). “Considérez les autres comme étant supérieur à vous-mêmes” (Ph 2:3) — concrètement comme ayant une vision de l'Église et de sa mission supérieure à la vôtre. “Si vous vous mordez et vous dévorez les uns les autres, prenez garde que vous ne soyez détruits les uns par les autres” (Ga 5:15). Etc.
Tout cela à vivre dans le cadre d’une structure donnée : Romains 12:8-9 : “que celui qui préside le fasse avec zèle ; que celui qui pratique la miséricorde le fasse avec joie. Que l’amour soit sans hypocrisie.” Pierre dira la même chose : “soyez soumis aux anciens. Et tous, dans vos rapports mutuels, revêtez-vous d’humilité ; car Dieu résiste aux orgueilleux, mais il fait grâce aux humbles” (1 P 5:5-6). Le tout en écho à ce qu’écrit Marc (3:25) sur la chute de Jérusalem : “si une maison est divisée contre elle-même, elle ne peut subsister”… Se souvenant de la leçon des Proverbes : “qui se plaît au mal provoque des querelles, et le rapporteur divise les amis” (16:28) ; “qui couvre une faute cherche l’amitié , mais qui la rappelle divise les amis” (Pr 17:9). « Accueillez-vous donc les uns les autres, comme le Christ vous a accueillis » (Ro 15:7). Ils vous a donnés les uns aux autres comme vous êtes…
Aujourd'hui encore, Dieu manifeste sa patience envers son figuier, pour qu'il porte ce fruit qui est d’être une bénédiction pour toutes et tous autour de lui. Pour que germe la justice, la paix vraie et la joie pour toutes et tous, si nombreux, qui en sont privés, qui n’en savent pas la source. Un appel à enrichir le monde, chacun, chacune à notre mesure, à notre humble mesure, face à la douleur du monde.
Luc 13.1-9
1 À ce moment survinrent des gens qui lui rapportèrent l'affaire des Galiléens dont Pilate avait mêlé le sang à celui de leurs sacrifices.
2 Il leur répondit : "Pensez-vous que ces Galiléens étaient de plus grands pécheurs que tous les autres Galiléens pour avoir subi un tel sort ?
3 Non, je vous le dis, mais si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous de même.
4 "Et ces dix-huit personnes sur lesquelles est tombée la tour à Siloé, et qu'elle a tuées, pensez-vous qu'elles étaient plus coupables que tous les autres habitants de Jérusalem ?
5 Non, je vous le dis, mais si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous de la même manière."
6 Et il dit cette parabole : "Un homme avait un figuier planté dans sa vigne. Il vint y chercher du fruit et n'en trouva pas.
7 Il dit alors au vigneron : Voilà trois ans que je viens chercher du fruit sur ce figuier et je n'en trouve pas. Coupe-le. Pourquoi faut-il encore qu'il épuise la terre ?
8 Mais l'autre lui répond : Maître, laisse-le encore cette année, le temps que je bêche tout autour et que je mette du fumier.
9 Peut-être donnera-t-il du fruit à l'avenir. Sinon, tu le couperas."
*
On est en route vers Jérusalem. “Des gens” rapportent à Jésus qu'un groupe de pèlerins galiléens y a été massacré par Pilate. Un rapport plein de sous-entendus. Ces Galiléens n'ont-ils pas eu là un signe menaçant ? Et toi Jésus, Galiléen, quelle est ton interprétation… ?
Jésus refuse évidemment de voir un quelconque lien de cause à effet entre on ne sait quel regard défavorable de Dieu et la violence qui a atteint les victimes. Mais derrière la question, de façon invisible, le problème est la division du peuple face à l’ennemi romain, entre Judéens et Galiléens. Ce que Jésus fait apparaître en rappelant une autre catastrophe : l'écroulement de la tour de Siloé, ayant tué dix-huit personnes, judéennes celles-là, de Jérusalem (v. 4), et non point galiléennes.
Alors comprenez, souligne Jésus, qu’il n'y a pas à considérer les victimes quelles qu’elles soient comme plus coupables que les autres (ces Galiléens-là et ces Judéens-là ne sont ni plus ni moins pécheurs que les autres - v. 2), mais il s’agit d’y voir une menace qui pèse sur tous ; les divisions du peuple déboucheront sur sa destruction par Rome, la nation de Pilate, qui n’en a pas que contre le seuls Galiléens. Toute division est affaiblissement de tous, ici Judéens comme Galiléens, — ce qui appelle à se convertir, c’est-à-dire à se tourner vers Dieu, se repentir : “si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous de la même manière” (v. 5). Tous !
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Et Jésus d'illustrer son appel par une parabole, la parabole du figuier stérile. Si le massacre qui a frappé les Galiléens semble donner raison à ceux qui prétendent mieux savoir que faire, ou être plus fidèles, ou moins pécheurs, leur insensibilité, leur manque de compassion fraternelle face à ce sort cruel, dévoile qu’ils ne savent trouver là que la justification terrible d'un stérile contentement de soi…
À cette stérilité, comme au figuier stérile, il faut du fumier, excrément, signe de pourrissement, de déperdition ; mais si cette déperdition est reconnue et confessée, le fumier peut devenir signe annonciateur d’une nouvelle fécondité : “si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous de la même manière”, Judéens comme Galiléens. Si vous reconnaissez le pourquoi de ce fumier, il deviendra promesse de renouveau. Convertissez-vous, repentez-vous : c’est Dieu seul qui fait croître, c’est lui qui, pour le dire avec les Actes des Apôtres (2:47), ajoute à son peuple ceux qu’il sauve lui-même. Cela ne dépend que de sa grâce.
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Paul a retenu la leçon, appliquée à l'Église : c’est sans doute le propos essentiel d’une épître comme la première aux Corinthiens, qu’il commençait en écrivant : “Je vous exhorte, frères [et sœurs], par le nom de notre Seigneur Jésus Christ, […] à ne point avoir de divisions parmi vous, mais à être parfaitement unis dans un même esprit et dans un même sentiment” (1 Co 1:10). Et devenant concret, au ch. 11, v. 18 : “j'apprends que, lorsque vous vous réunissez en assemblée, il y a parmi vous des divisions, et je le crois en partie”.
Façon de dire aux Corinthiens, par un trait d'ironie, que le problème concerne bien leur Église. Divisions en écarts sociaux non résolus, en clans, etc. Face au drame de divisions qui, derrière les sourires convenus, ne disent pas leur nom, mais transpirent de partout, Paul ira jusqu’à prôner l’abolition des repas d'Église à Corinthe, ces repas censés être fraternels, mais devenus de fait lieu d’hypocrisie. Mieux vaut arrêter, écrit-il : vous pouvez manger chez vous (1 Co 11:22) !
Après quoi, ch. 12, il développe son propos sur le corps qui ne peut qu’être un pour fonctionner, et sur les dons de l’Église, le don le plus désirable étant l’amour fraternel (1 Co 13) ; écho aux propos qu’il tient dans plusieurs épîtres. Je cite, petit florilège non exhaustif : “Soumettez-vous les uns aux autres” (Ep 5:21). “Considérez les autres comme étant supérieur à vous-mêmes” (Ph 2:3) — concrètement comme ayant une vision de l'Église et de sa mission supérieure à la vôtre. “Si vous vous mordez et vous dévorez les uns les autres, prenez garde que vous ne soyez détruits les uns par les autres” (Ga 5:15). Etc.
Tout cela à vivre dans le cadre d’une structure donnée : Romains 12:8-9 : “que celui qui préside le fasse avec zèle ; que celui qui pratique la miséricorde le fasse avec joie. Que l’amour soit sans hypocrisie.” Pierre dira la même chose : “soyez soumis aux anciens. Et tous, dans vos rapports mutuels, revêtez-vous d’humilité ; car Dieu résiste aux orgueilleux, mais il fait grâce aux humbles” (1 P 5:5-6). Le tout en écho à ce qu’écrit Marc (3:25) sur la chute de Jérusalem : “si une maison est divisée contre elle-même, elle ne peut subsister”… Se souvenant de la leçon des Proverbes : “qui se plaît au mal provoque des querelles, et le rapporteur divise les amis” (16:28) ; “qui couvre une faute cherche l’amitié , mais qui la rappelle divise les amis” (Pr 17:9). « Accueillez-vous donc les uns les autres, comme le Christ vous a accueillis » (Ro 15:7). Ils vous a donnés les uns aux autres comme vous êtes…
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Aujourd'hui encore, Dieu manifeste sa patience envers son figuier, pour qu'il porte ce fruit qui est d’être une bénédiction pour toutes et tous autour de lui. Pour que germe la justice, la paix vraie et la joie pour toutes et tous, si nombreux, qui en sont privés, qui n’en savent pas la source. Un appel à enrichir le monde, chacun, chacune à notre mesure, à notre humble mesure, face à la douleur du monde.
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