Michée 5, 1-5 ; Psaume 80 ; Hébreux 10, 5-10 ; Luc 1, 39-45
Luc 1, 39-45
Qu'a dit celui qui a répandu comme une onction son ombre (Luc 1, 35) et son Nom sur le « oui » de la jeune fille (cf. Cantique des Cantiques 1, 3) qui visite ce jour le foyer sacerdotal de sa parente Élisabeth, dans les montagnes de Judée ? « Je t'aime comme l'on aime certaines choses obscures, de façon secrète, entre l'ombre et l'âme ». J'emprunte ces mots au poète Pablo Neruda, donnant comme un écho à la Parole adressée aujourd'hui dans le secret à la jeune femme, bénie entre toutes les femmes, selon l'Évangile, bénie d'un secret (« le Saint Esprit de couvrira de son ombre » — a dit l’ange, Luc 1, 35), un secret appelé à résonner intimement au cœur de nos âmes, au cœur de nos vies à chacune et chacun.
Y a-t-il au fond, déclaration ou don d'amour dont la vérité profonde ne soit pas secrète, au-delà de ce que les mots peuvent dire, sauf à s'en tenir à la surface, sauf à attendre de recevoir en retour ?
Nous sommes bien, avec l'Évangile de ce jour, au jour d'un secret, un secret qui s'est tramé dans le sein d'une jeune fille, entre Dieu et elle, puis partagé ici entre deux femmes, secret qui caractérise le don de Dieu. Un don de Dieu est de l'ordre du secret ! Mais qui sait le percevoir ? L'enfant d’Élisabeth enceinte, qui tressaille dans le sein de sa mère.
Le don de Dieu, appelé à germer dans nos vies est donc d'abord un secret.
Jean, dans le sein de sa mère, tressaille en la présence de ce secret du don de Dieu : caché dans la vie de la mère enceinte du Messie. Et la mère de Jean traduit, selon l'Esprit saint précise le texte, le sens de ce tressaillement : « Tu es bénie entre les femmes et le fruit de ton sein est béni. Cela m'est un privilège que tu me visites ! » — « Bienheureuse celle qui a cru. »
« Bienheureuse parce que tel est le fruit de ton sein. » On retrouve plus tard, en Luc 11 (v. 27-28), une bénédiction semblable prononcée par une autre une femme, anonyme, celle-là : « Une femme, élevant la voix du milieu de la foule, dit à Jésus : Heureux le sein qui t’a porté ! Heureux les seins qui t’ont allaité ! Et il répondit : Heureux plutôt ceux qui écoutent la parole de Dieu, et qui la gardent ! »
Bénédiction similaire à celle d'Élisabeth, prononcée d'abord par Élisabeth dans l'intimité des commencements.
L'épisode du ch. 11 renvoie donc à ce ch. 1, à notre passage, et au v. 48, où Marie y fait elle-même écho : « toutes les générations me diront bienheureuse », disait Marie. Makaria, le même mot : la femme du ch. 11 entame l'accomplissement de la parole l’Élisabeth, et la parole de Marie sur elle-même : « toutes les générations me diront bienheureuse ».
Et Jésus, lui, la renvoie à cette autre bénédiction que prononçait Élisabeth sur sa mère : en Luc 1, 45, elle prononçait : « heureuse celle qui a cru ». Et voilà qui nous renvoie aussi à toutes les grandes ancêtres, et en premier lieu à Sara, et à la promesse à Abraham. Espérer contre toute espérance, écouter la parole de Dieu et la garder pour la voir germer. « Heureuses, heureux ceux qui écoutent la Parole et la gardent ». Et plus encore, ici : c'est le Fils de Dieu que Marie a porté.
Ici Dieu a renversé tous les impossibles : on croirait savoir que les stériles n'enfantent pas, pas plus que les vierges ; on croirait savoir que les morts ne ressuscitent ni que les prophètes ne marchent sur les eaux ou que les pains se multiplient pour les pauvres !
Et voilà que Dieu intervient ! Secrètement. Voilà que s'approche le temps où les souffrances prennent fin. Voilà que l'on découvre dans l'intimité de la rencontre de deux femmes, que Dieu, discrètement, dans le secret, prépare ce grand moment de façon cachée dans le sein d'une femme.
Cela, Jean dans le sein de sa mère et Élisabeth à son tour, le pressentent : le jour de la délivrance approche. Ce jour que nous fêtons à Noël. Et Élisabeth a perçu le comment de l'accueil de cette délivrance : « heureuse celle qui a cru à l'accomplissement de la promesse. » Et elle est bien placée pour savoir, Élisabeth, elle, stérile mais qui a bénéficié pour sa part du miracle de l'enfantement.
Mais le miracle fondamental, c'est bien sûr le mystère de la Parole. Cette Parole non seulement a fait germer le sein d'Élisabeth, et le sein de Marie, — mais c'est cette Parole-même que Marie porte en son sein, c'est le Messie par qui vient la délivrance. Élisabeth l'a compris. Son miracle à elle est là comme signe, comme tout autre miracle, jamais fin en soi.
Marie, elle, porte une tout autre réalité. En elle la Parole devient chair, pour porter toutes nos délivrances. Cette Parole est la Parole qu'il faut écouter et recevoir. Cette même Parole que Marie recevait et qui faisant fructifier son sein vierge, cette Parole est ainsi annoncée comme une semence, qui, contre tous les malheurs, est destinée à germer jusque dans le Royaume.
L'intervention de Dieu n'est pas tant de l'ordre du coup d'éclat que du type de la semence. La semence d'une parole qui, reçue et gardée, produira des fruits inimaginables depuis le cœur de nos malheurs. La semence de la parole de Dieu dans le sein de Marie est celle du corps du Christ ressuscité.
Cette Parole engendre par le Christ des enfants qui ne sont pas nés de la chair ni de la volonté de l'homme, mais de Dieu. Au cœur des impossibles, c'est la Parole de Dieu seul qui fait germer son Royaume.
Impossible ! Mais c'est précisément ça, l’Évangile ! Dieu, dans le secret, fait ce qui est impossible, ce que les sages ne peuvent pas admettre, le don gratuit se fait dans le secret.
Luc 1, 39-45
39 En ce temps-là, Marie partit en hâte pour se rendre dans le haut pays, dans une ville de Juda.
40 Elle entra dans la maison de Zacharie et salua Élisabeth.
41 Or, lorsque Élisabeth entendit la salutation de Marie, l'enfant bondit dans son sein et Élisabeth fut remplie du Saint Esprit.
42 Elle poussa un grand cri et dit : « Tu es bénie plus que toutes les femmes, béni aussi est le fruit de ton sein !
43 Comment m'est-il donné que vienne à moi la mère de mon Seigneur ?
44 Car lorsque ta salutation a retenti à mes oreilles, voici que l'enfant a bondi d'allégresse en mon sein.
45 Bienheureuse celle qui a cru : ce qui lui a été dit de la part du Seigneur s'accomplira ! »
*
Qu'a dit celui qui a répandu comme une onction son ombre (Luc 1, 35) et son Nom sur le « oui » de la jeune fille (cf. Cantique des Cantiques 1, 3) qui visite ce jour le foyer sacerdotal de sa parente Élisabeth, dans les montagnes de Judée ? « Je t'aime comme l'on aime certaines choses obscures, de façon secrète, entre l'ombre et l'âme ». J'emprunte ces mots au poète Pablo Neruda, donnant comme un écho à la Parole adressée aujourd'hui dans le secret à la jeune femme, bénie entre toutes les femmes, selon l'Évangile, bénie d'un secret (« le Saint Esprit de couvrira de son ombre » — a dit l’ange, Luc 1, 35), un secret appelé à résonner intimement au cœur de nos âmes, au cœur de nos vies à chacune et chacun.
Y a-t-il au fond, déclaration ou don d'amour dont la vérité profonde ne soit pas secrète, au-delà de ce que les mots peuvent dire, sauf à s'en tenir à la surface, sauf à attendre de recevoir en retour ?
Nous sommes bien, avec l'Évangile de ce jour, au jour d'un secret, un secret qui s'est tramé dans le sein d'une jeune fille, entre Dieu et elle, puis partagé ici entre deux femmes, secret qui caractérise le don de Dieu. Un don de Dieu est de l'ordre du secret ! Mais qui sait le percevoir ? L'enfant d’Élisabeth enceinte, qui tressaille dans le sein de sa mère.
Le don de Dieu, appelé à germer dans nos vies est donc d'abord un secret.
Jean, dans le sein de sa mère, tressaille en la présence de ce secret du don de Dieu : caché dans la vie de la mère enceinte du Messie. Et la mère de Jean traduit, selon l'Esprit saint précise le texte, le sens de ce tressaillement : « Tu es bénie entre les femmes et le fruit de ton sein est béni. Cela m'est un privilège que tu me visites ! » — « Bienheureuse celle qui a cru. »
« Bienheureuse parce que tel est le fruit de ton sein. » On retrouve plus tard, en Luc 11 (v. 27-28), une bénédiction semblable prononcée par une autre une femme, anonyme, celle-là : « Une femme, élevant la voix du milieu de la foule, dit à Jésus : Heureux le sein qui t’a porté ! Heureux les seins qui t’ont allaité ! Et il répondit : Heureux plutôt ceux qui écoutent la parole de Dieu, et qui la gardent ! »
Bénédiction similaire à celle d'Élisabeth, prononcée d'abord par Élisabeth dans l'intimité des commencements.
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L'épisode du ch. 11 renvoie donc à ce ch. 1, à notre passage, et au v. 48, où Marie y fait elle-même écho : « toutes les générations me diront bienheureuse », disait Marie. Makaria, le même mot : la femme du ch. 11 entame l'accomplissement de la parole l’Élisabeth, et la parole de Marie sur elle-même : « toutes les générations me diront bienheureuse ».
Et Jésus, lui, la renvoie à cette autre bénédiction que prononçait Élisabeth sur sa mère : en Luc 1, 45, elle prononçait : « heureuse celle qui a cru ». Et voilà qui nous renvoie aussi à toutes les grandes ancêtres, et en premier lieu à Sara, et à la promesse à Abraham. Espérer contre toute espérance, écouter la parole de Dieu et la garder pour la voir germer. « Heureuses, heureux ceux qui écoutent la Parole et la gardent ». Et plus encore, ici : c'est le Fils de Dieu que Marie a porté.
Ici Dieu a renversé tous les impossibles : on croirait savoir que les stériles n'enfantent pas, pas plus que les vierges ; on croirait savoir que les morts ne ressuscitent ni que les prophètes ne marchent sur les eaux ou que les pains se multiplient pour les pauvres !
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Et voilà que Dieu intervient ! Secrètement. Voilà que s'approche le temps où les souffrances prennent fin. Voilà que l'on découvre dans l'intimité de la rencontre de deux femmes, que Dieu, discrètement, dans le secret, prépare ce grand moment de façon cachée dans le sein d'une femme.
Cela, Jean dans le sein de sa mère et Élisabeth à son tour, le pressentent : le jour de la délivrance approche. Ce jour que nous fêtons à Noël. Et Élisabeth a perçu le comment de l'accueil de cette délivrance : « heureuse celle qui a cru à l'accomplissement de la promesse. » Et elle est bien placée pour savoir, Élisabeth, elle, stérile mais qui a bénéficié pour sa part du miracle de l'enfantement.
Mais le miracle fondamental, c'est bien sûr le mystère de la Parole. Cette Parole non seulement a fait germer le sein d'Élisabeth, et le sein de Marie, — mais c'est cette Parole-même que Marie porte en son sein, c'est le Messie par qui vient la délivrance. Élisabeth l'a compris. Son miracle à elle est là comme signe, comme tout autre miracle, jamais fin en soi.
Marie, elle, porte une tout autre réalité. En elle la Parole devient chair, pour porter toutes nos délivrances. Cette Parole est la Parole qu'il faut écouter et recevoir. Cette même Parole que Marie recevait et qui faisant fructifier son sein vierge, cette Parole est ainsi annoncée comme une semence, qui, contre tous les malheurs, est destinée à germer jusque dans le Royaume.
L'intervention de Dieu n'est pas tant de l'ordre du coup d'éclat que du type de la semence. La semence d'une parole qui, reçue et gardée, produira des fruits inimaginables depuis le cœur de nos malheurs. La semence de la parole de Dieu dans le sein de Marie est celle du corps du Christ ressuscité.
Cette Parole engendre par le Christ des enfants qui ne sont pas nés de la chair ni de la volonté de l'homme, mais de Dieu. Au cœur des impossibles, c'est la Parole de Dieu seul qui fait germer son Royaume.
Impossible ! Mais c'est précisément ça, l’Évangile ! Dieu, dans le secret, fait ce qui est impossible, ce que les sages ne peuvent pas admettre, le don gratuit se fait dans le secret.
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